Anne-Cécile Juillet | 10.06.2009-Le Parisien

Si l’enjeu du procès qui s’est ouvert le 25 mai dernier à Paris pour escroquerie bande organisée est si important pour l’Eglise de Scientologie en France, c’est parce qu’en tant que personne morale, et en cas de condamnation, elle risque la dissolution.

Ce mercredi, à la barre se sont présentés Eric Roux et Aurore Nadler. Le premier représente le Celebrity Center, l’un des deux sites parisiens de la Scientologie.
La seconde, la Sarl SEL, cette librairie qui, au sein des locaux de la Scientologie, commercialise les œuvres de son fondateur, L.Ron Hubbard. Sa vraie gérante depuis 1997 a refusé de se rendre au procès. Elle vit au Danemark, où se trouve le siège de la Scientologie en Europe. Depuis sa prise de fonctions, elle ne s’est rendue à la librairie parisienne que «cinq ou six fois».

Devant le tribunal correctionnel, Eric Roux, homme grand et mince à la voix posée, passe trois heures à la barre. Ce «Ministre de l’Eglise de scientologie», habitué aux prêches, paraît tout à fait à l’aise devant l’auditoire, au point de vouloir même parfois même en mener le tempo. La présidente, Sophie-Hélène Chateau, avant de lui laisser la parole, lâche un sybillin: «J’imagine que vous avez été bien entraîné», en référence à plusieurs témoins expliquant qu’«en Scientologie, on était entraîné à mentir devant les tribunaux».

{{«Nous ne sommes pas un grand magasin!»}}

Eric Roux indique simplement que «tout cela est faux», et balaie d’un revers de main les témoignages à charges portés contre son organisation. Son message tient en un refrain, répété à l’envi à la barre: à l’église de Scientologie, «on ne se met pas un centime dans la poche». Oui, la Scientologie fait payer des «contributions» à ses membres, mais quelle Eglise ne le fait pas? Oui, on se réjouit lorsque l’on reçoit des donations importantes, comme n’importe quelle Eglise qui souhaite «aider l’humanité à progresser». Non, on ne recherche pas de nouveaux adeptes en fonction de leurs revenus. Non, il n’existe pas de refacturation à destination de la maison-mère.

Si le tribunal lui fait remarquer que, pourtant, des témoignages de scientologues, et même des textes de Ron Hubbard indiquent qu’il faille remplir des objectifs chiffrés, il rétorque que ceux-ci sont religieux… et que l’aspect financier se lie forcément à la religion. «Nous ne sommes pas un grand magasin!», plaide Eric Roux, niant toute forme de relance téléphonique pour les adeptes peu pratiquants, comme s’en était émue une plaignante, ou toute forme de «vente à la dure (une technique appelée hard sale en scientologie, NDLR)».

L’explication à ce sujet, c’est Aurore Nadler qui l’apportera au tribunal: «En fait, hard sale, cela veut dire prendre soin de la personne, c’est une définition scientologue», indique la gérante de fait de la librairie. «Ah bon?» s’étonne la présidente. «Oui, cela veut dire qu’on prend tout le temps nécessaire pour comprendre ses besoins.» Puis lui vendre des «services religieux».