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G.M France-Guyane 25.02.2010

Le procès en appel de l’église du Christianisme céleste à laquelle appartiennent quatre accusés a débuté hier matin par l’étude de leurs personnalités. Tous ont réfuté les analyses de l’expert psychiatre. À cause d’un incident majeur en fin d’après-midi, la salle a dû être évacuée.
ASSISES. Les faits : Roger, un garçon âgé de 15 ans a été retrouvé mort dans une église de la cité Césaire à Cayenne le 3 janvier 2005. Sa mère l’avait laissé là pour tenter de le faire guérir de son épilepsie par des prières. Mais la brutalité à laquelle l’adolescent a été soumis a eu l’effet contraire. On l’avait attaché et bâillonné sur une croix.

Maurice Saint-Pierre qui a été condamné à douze ans de réclusion criminelle en première instance pour violence sur personne vulnérable ayant entraîné la mort sans intention de la donner, a « prêché pour sa paroisse » lorsqu’il a été interrogé sur sa personnalité.

Cet ancien maçon qui a gravi un certain nombre d’échelons avant d’entrer à la mairie de Cayenne (il y a une trentaine d’années) prépare un concours de contrôleur de travaux.

Il a expliqué comment il était arrivé à fréquenter l’église du Christianisme céleste : « J’ai eu deux doigts paralysés à une époque et, de fil en aiguille, j’ai fréquenté un groupe de personnes auprès desquelles j’ai trouvé de la disponibilité et une approche d’amour. J’y ai rencontré la dame qui est mon épouse aujourd’hui. Peu après notre rencontre, j’ai constaté que ma paralysie avait disparu. J’en ai parlé à mon médecin traitant qui m’a dit « Ca s’appelle des miracles, ça existe. » Par la suite j’ai proposé, en mars 1996, que mon local du rez-de-chaussée serve aux prières tous les samedis après-midi : il y avait entre 260 et 320 personnes […] J’ai participé à une formation de trois semaines dans le cadre de l’église du Christianisme céleste à Paris et ensuite un responsable est venu en Guyane pendant deux mois et demi. »

Le psychiatre qui ne l’aurait questionné que cinq à six minutes en prison lui aurait dit : « Vous vous prenez pour Jésus Christ et vous avez, paraît-il, des dons. » « J’ai répondu que je priais pour les gens par amour et que si j’avais eu des dons je me serais déjà guéri du diabète alors que pour me soigner j’utilise l’insuline. J’ai bien précisé que je n’avais pas de pouvoir et encore moins celui d’un gourou. »

Le rapport du psychiatre fait état qu’il ne se décrit pas comme étant un visionnaire mais qu’il reste convaincu que la prière peut guérir de nombreuses maladies comme le sida, le cancer et de nombreux autres maux aussi redoutables.

Il indique aussi que le quinquagénaire n’a pas été ému de voir la victime attachée toute une nuit qui a précédé sa mort, que ce n’était pas la voix de Roger qu’il entendait mais celle d’un démon, qu’il s’autoproclamait d’un pouvoir sur autrui ou encore qu’il avait besoin de reconnaissance et de pouvoir.

« Nous avons voulu apporter notre contribution par la prière, lors des faits qui ont été présentés ?[…] Maintenant nous ne permettons à personne de dormir sur place et nous n’attachons plus personne. Ceux qui viennent attachés le sont par leur famille mais jamais par nous ou à notre demande » , a lancé celui-ci. « Qu’est-ce qui vous fait dire que vous avez fait le bon choix ? » , lui a demandé Me Tshefu faisant allusion à celui de l’église en question. « Ce choix est dû à ma guérison.»

{{Tous mystico-religieux}}

Félicité-Denise Saint-Pierre, 52 ans, alias « Holy maman » , condamnée en première instance à sept ans de prison, a également soutenu qu’elle ne se reconnaissait pas du tout dans la description faite par le psychiatre, absent à la barre au grand dam des dix avocats en présence. Le jour des faits sa participation aurait été moindre puisqu’elle affirme qu’elle était en train de préparer le carnaval.

Le psychiatre a déduit de l’entretien que cette mère de trois enfants « fournissait des réponses pauvres et conventionnelles, qu’elle était mal à l’aise en répondant, s’attribuait des titres religieux et s’autoproclamait des pouvoirs mystico-religieux. »

L’accusée a précisé en substance, en contestant cette analyse : « J’ai des visions. Ce sont des images que j’aie. J’ai eu des visions sur la santé des fidèles mais jamais sur celle de Roger. »

Alain Lescot, 41 ans, adjoint administratif dans l’armée, qui a écopé de trois ans en première instance (dont deux avec sursis), a estimé, lui aussi, le rapport de l’expert discutable.

En effet, Il ne s’attribuait pas, comme l’a souligné le médecin, un pouvoir divin et ne vivait pas dans un contexte de croyance mystico-religieux. Il a par ailleurs été décrit comme quelqu’un qui redoutait les questions, qu’il était introverti, voire secret, et qu’il avait le sentiment de posséder un pouvoir. Il a expliqué-comme les autres-que l’entretien avait été court : 10 minutes.

Jean-Luc Rosa, 36 ans, cuisinier dans l’administration, aurait été mal à l’aise devant le psychiatre selon ce dernier. Il se cacherait également derrière une volonté de pouvoir et se serait auto-proclamé sur le pouvoir médical. « Je n’ai jamais dit cela, a t-il soutenu à la barre […] Pourquoi l’église de Christiannisme céleste ? Parce que l’approfondissement de la bible est bien plus important que dans l’église catholique.

Hier après-midi la Cour s’est penchée sur les manières particulièrement originales et curieuses, jugées parfois sordides, des prêches agrémentés de coups de sangles et de rameaux.

Un incident de séance majeur s’est produit en fin d’après-midi lorsqu’un témoin, une jeune fille qui avait 13 ans à l’époque des faits, a prétendu qu’elle avait été attachée parfois plusieurs heures sur une croix et qu’il lui était arrivé de dormir dessus avec ses liens.

Et quand elle a prétendu qu’elle avait été brûlée volontairement par l’encensoir de Maurice Saint-Pierre un avocat lui a fait remarquer avec emphase qu’elle avait prétendu le contraire le 11 juillet 2005… C’est alors que l’avocat général qui n’a pas du tout apprécié la virulence de cette intervention a bondi et s’est livré lui aussi à des remarques à haute voix.

Deux autres avocats, l’un de la défense et l’autre de la partie civile, ont été à la limite d’en venir aux mains. Le président a dû faire évacuer la salle d’autant que le public commençait à se manifester.