Un procès pour travail dissimulé mettant en cause certaines pratiques de membres de la puissante organisation catholique de l’Opus Dei s’est ouvert jeudi après-midi devant le tribunal correctionnel de Paris.

Les trois prévenues sont poursuivies pour “travail dissimulé” et “rétribution contraire à la dignité”.

A l’origine de la procédure: Catherine Tissier, entrée à l’Opus Dei en 1985. A 14 ans, son collège conseille à ses parents de la diriger vers l’école Dosnon. C’est seulement en fin d’année, à l’occasion d’un film projeté sur le fondateur de l’Opus Dei, Saint Josémaria Escriva de Balaguer, que les parents de Catherine découvrent que l’école “appartient à l’Oeuvre”.

Jeudi, le trésorier de l’Acut, Francis Baer, a reconnu qu’il existait bien un lien entre l’Association et l’Opus Dei, mais selon lui, ce lien se limite aux activités pastorales.

Après avoir passé son CAP, Catherine dit avoir durant 13 ans nettoyé, rangé et servi tous les jours durant une douzaine d’heures, week-end compris, sans jamais prendre de vacances, ni être valablement payée, dans différents établissements gérés par l’Opus Dei.

“En janvier 2001”, a-t-elle raconté, “je suis allée en urgence chez le médecin de mes parents”. “Il m’a expliqué que j’étais droguée à très forte dose, avec des neuroleptiques et leurs génériques”. La jeune femme quitte alors l’Acut. Elle mettra deux ans et demi pour se remettre sur pied.

A l’époque, a-t-elle témoigné jeudi, les salaires sont “rentrés sur mon compte bancaire, mais ils en sont sortis tout seul. Les sommes, je ne les ai jamais vues. On était reponctionnés par la direction.”

On lui aurait versé un salaire, mais ses directeurs successifs lui auraient demandé de leur signer des chèques en blanc, qu’ils remplissaient ensuite, prétendument pour récupérer des frais d’hébergement ou de librairie.

“Au bout de 15 ans, j’avais dix euros sur mon compte”, a résumé Catherine Tissier, frêle silhouette en long gilet gris.

Faux, répond Agnès Duhail. “Elle a été payée, toutes les charges sociales ont été payées. (…) Elle a toujours fait ce qu’elle a voulu. Si elle a voulu faire un chèque en blanc, elle l’aura fait.”

“Tout le monde a été payé et faisait ce qu’il voulait avec son argent. C’est la seule à tenir ces propos”, a appuyé Claire Bardon de Segonzac.

“Je suis la seule à avoir osé porté plainte”, a rétorqué Catherine Tissier. “Je connais des gens qui en sont sorti qui disent à la virgule près la même chose que moi. Il y en a qui me disent encore: +J’en fais des cauchemars toute la nuit. J’ai peur.+”

“Il n’est pas rare que des individus se retournent contre l’institution auprès de laquelle ils ont trouvé à un moment de leur vie satisfaction”, a argué pour sa part M. Baer.

“Le Centre de rencontres internationales a fait l’objet de contrôles de toutes sortes, à la suite d’accusations gravissimes et à chaque fois, on a pu constater que les choses se passaient dans la légalité et que les gens étaient contents”, a-t-il ajouté, dénonçant une enquête menée avec “acrimonie”.

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