Il s’appelle Rui, est portugais et a vécu douze ans à Bruxelles à travailler pour rien dans les établissements de la secte OKC. Douze ans de manipulations, dont il est parvenu, hier, à faire le récit, devant le tribunal correctionnel de Bruxelles.

Rui est entré dans la communauté à 20 ans, en 1982, au Portugal. En 1984, Robert Spatz, le lama d’OKC l’a « envoyé à Bruxelles travailler au Paradoxe, son restaurant de salades ». Situé chaussée d’Ixelles, dans le quartier Flagey, ce restaurant macrobiotique – qui existe toujours sous un autre nom – était tenu par des adeptes, logés, nourris et non payés.

L’ancien restaurateur décrit le système mis en place par Spatz comme « une dictature déguisée. Il était très gentil, nous étions ses élus, ses fils et filles. Il nous protégeait de tous les dangers et du monde extérieur ».

Après une année à préparer les salades du Paradoxe, Rui était vendeur au magasin bio d’à côté avant de tenir le bar du Paradoxe où il animait trois soirées musicales par semaine (jazz, musique du monde…), tout en éditant un périodique, nommé Le Paradoxe, qui annonçait les concerts à venir. Spatz venait y manger. « Pas vêtu comme un lama mais habillé avec sa veste autrichienne, son nœud papillon, son parfum Habit Rouge qui sentait à cinq mètres. »

Vivant en communauté avec les autres travailleurs, Rui n’avait pas d’argent. Acheter un simple pantalon ne pouvait se faire sans l’aval du gourou. « Il pouvait se fâcher si on achetait ou faisait quelque chose sans lui demander. » Plus grave : « Si on ne travaillait pas assez, on devait faire des prosternations supplémentaires. Et critiquer le lama, c’était risquer des millions de réincarnations dans les enfers les plus pénibles. »

Fin 1996, Spatz hurle sur Rui en public et « l’humilie ». Puis viennent les perquisitions. Arrêté dans le restaurant, il est mis en prison. Le début d’un processus de sortie de la secte. « Je me suis réveillé. J’étais de plus en plus mal. Je me suis rendu compte que j’ai cru bosser quinze ans pour OKC, alors que c’était pour Spatz. Son système était mafieux. C’était du volontariat à durée indéterminée. Il m’a manipulé de manière subtile. Aujourd’hui, il a plus de 70 ans, je ne veux pas qu’il aille en prison mais qu’il soit condamné. Et qu’il dédommage tous les gens qu’il a fait travailler. »

source :dh.com