Qu’est-ce que le Fijais ?

Créé en 2004, à la suite de l’affaire Guy Georges, ce fichier était pourtant ambitieux, puisqu’il devait regrouper tous les noms des personnes mises en cause dans des infractions à caractère sexuel sur mineurs, y compris en l’absence de condamnation.

Une consultation non obligatoire

Seize ans plus tard, le Fijais a beaucoup grossi (78 197 noms y figurent, selon la Chancellerie) mais reste trop peu utilisé en préalable des embauches. Malgré des scandales en série, dans le sport et ailleurs, les employeurs n’ont toujours pas l’obligation de le consulter. La raison ? Cette consultation n’est pas toujours « techniquement possible dans de bonnes conditions », justifie le secrétariat d’État à la protection de l’enfance.

Sur le papier, les dirigeants de clubs sportifs, responsables associatifs, etc., peuvent savoir si tel ou tel candidat à l’embauche est auteur d’une infraction sexuelle ou particulièrement grave listée à l’article 706-47 du code de procédure pénale (crime, meurtre, actes de torture, etc.). Premier problème, cette liste n’est pas exhaustive. Le cabinet d’Adrien Taquet reconnaît « des trous dans la raquette. Par exemple, jusqu’à récemment, 60 % des détenteurs d’images pédopornographiques ne figuraient pas au Fijais car la peine encourue était inférieure à 5 ans et leur inscription n’était donc que facultative. C’est pourquoi nous avons alourdi la peine. Leur inscription est, de ce fait, devenue automatique. »

Des modalités d’accès compliquées

Ensuite, cette consultation n’est pas contraignante : l’employeur potentiel reste libre de donner suite ou non au recrutement. Enfin, elle reste techniquement compliquée. Seul l’État et ses administrations déconcentrées ont un accès direct au Fijais. Mais pas les collectivités locales ou les associations. Les premières doivent formuler leur demande à la préfecture, qui interroge le fichier, et est censée faire un retour rapide. Les structures privées et associatives doivent, elles, se tourner vers leur administration de tutelle (par exemple, jeunesse et sports) qui doit leur redescendre l’information au plus vite. Mais c’est sans compter les incompatibilités de logiciels et la surcharge de travail des équipes. Résultat, l’aller-retour peut prendre six mois.

Dans certaines administrations ou services, des progrès réels ont cependant été accomplis. Ainsi, l’éducation nationale contrôle systématiquement le fichier lors des recrutements et en cours de carrière. Le « ministère de la jeunesse et des sports vérifie de son côté l’honorabilité de 170 000 éducateurs chaque année », avance le gouvernement.

L’audit étudiera plusieurs pistes d’amélioration : une fois les aspects techniques réglés, il s’agira de rendre la consultation obligatoire, promet le secrétariat d’État, et d’étendre le fichier aux personnels encore non-contrôlés, comme les gardes d’enfants à domicile et les assistants familiaux.

  • Emmanuelle Lucas,
  • https://www.la-croix.com/Famille/Education/Pedophilie-vers-verification-systematique-professionnels-lenfance-2020-02-06-1201076734