PARIS (AP) — Le ministère public a demandé jeudi à la cour d’appel de Paris d’infliger des peines « suffisamment dissuasives » contre l’Eglise de scientologie, requérant une amende d’au moins un million d’euros contre la branche française du mouvement créé par L. Ron Hubbard. Cinq cent mille euros d’amende ont par ailleurs été requis à l’encontre de la librairie scientologue SEL.
En l’absence de la défense, la décision a été mise en délibéré au 2 février à 9h.
L’association spirituelle de l’Eglise de Scientologie avait été condamnée à une amende de 400.000 euros et la librairie à 200.000 euros d’amende par le tribunal correctionnel.
L’avocat général a rappelé que les méthodes du mouvement avaient déjà été sanctionnées par d’autres juridictions, à Lyon en 1997 et à Marseille en 1999. « Manifestement, les personnes impliquées dans la présente poursuite n’ont pas tiré les conséquences de ces précédentes condamnations, prononcées à raison de pratiques similaires », a-t-il noté.
Par ailleurs, M. Woirhaye a demandé de 18 mois à deux ans de prison avec sursis contre quatre responsables du mouvement, requérant ainsi une aggravation des sanctions pour deux d’entre eux. Il a également requis de 15.000 à 30.000 euros d’amende. Fin octobre 2009, le tribunal correctionnel avait prononcé des peines allant de dix mois à deux ans d’emprisonnement avec sursis.
Deux autres membres de la Scientologie avaient été condamnés en première instance à des amendes pour « exercice illégal de la pharmacie ». L’un a fait appel. L’avocat général a requis 4.000 euros d’amende à son encontre, contre 2.000 euros prononcés en première instance.
La défense a quitté le procès la semaine dernière, le mouvement ne souhaitant plus cautionner une procédure qu’il juge « faussée et inéquitable ». Pour l’Eglise de Scientologie, le parquet général a « démontré » qu’il était « aux ordres » du ministère de la Justice.
« Dans ce procès fantôme, dans lequel il n’y avait ni prévenus, ni défense, ni victimes, seule la religion scientologue a été jugée. Par l’intermédiaire du parquet et des dérives scandaleuses du ministère de la Justice, l’Etat français a renoué avec les guerres de religion, les réquisitions prises à l’audience confinant à une justice stalinienne », estime l’organisation dans un communiqué diffusé jeudi. « Un tel réquisitoire digne d’une parodie de justice ne relèvera pas l’honneur de notre pays au regard des pays démocratiques respectueux de la liberté de religion ».
Hugues Woirhaye a quant à lui dénoncé la « stratégie d’esquive » de la défense, « planifiée en fonction du calendrier du procès pour perturber sa tenue ». « Une telle stratégie relève d’un choix délibéré, se maintenir dans une posture de déni systématique », a-t-il considéré. La Scientologie a déplacé son combat sur le terrain, avec deux manifestations dans la semaine, notamment jeudi, devant les grilles du palais de justice pour dénoncer un procès inéquitable.
L’affaire avait démarré lorsqu’une ancienne adepte avait déposé plainte avec constitution de partie civile en décembre 1998. Au mois de mai précédent, elle avait été abordée à la sortie d’une station de métro par des scientologues. L’association lui avait d’abord proposé un test de personnalité, puis un rendez-vous pour en interpréter le résultat. La plaignante avait dépensé 140.000FF (21.300 euros) en livres, cours de communication ou de « réparation de vie », ainsi qu’en « packs de purification ».
Elle s’est désistée en appel de sa constitution de partie civile. Seuls le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens et l’Union nationale des associations de défense des familles et de l’individu (UNADFI) figuraient encore sur le banc des parties civiles pour ce procès. La cour d’appel devra d’ailleurs se prononcer dans son arrêt sur la validité de la constitution de partie civile de l’UNADFI.
Son avocat, Me Olivier Morice, a précisé que l’Union était là pour « porter la voix des victimes » de la Scientologie, appelant la cour d’appel à prendre une décision « historique ». Si la branche française du mouvement, considéré comme une secte en France, est condamnée, ce sera « la première fois en France (…) qu’on dira que ses méthodes relèvent de l’escroquerie en bande organisée ». AP
Source : ASSOCIATED PRESS (AP) le 24-11-11 à 16:30