M. Guillaume Bachelay appelle l’attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les actions des mouvements sectaires auprès des personnes âgées et sur les moyens de protéger nos anciens. La Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), dans son rapport 2011-2012, le rappelle : « les personnes âgées, fragilisées par l’âge, l’isolement, le deuil, la maladie, la perte des repères, l’altération des capacités physiques ou intellectuelles, sont des victimes idéales des mouvements sectaires, pas autant comme cibles à recruter que comme sources potentielles de revenus et de capitaux ». Elle cite également Bernard Ennuyer, docteur en sociologie, enseignant-chercheur à l’université Paris-Descartes, ancien directeur d’un service d’aide et de soins à domicile : « … c’est de toute évidence la fraction âgée à partir de 80-85 ans qui est beaucoup plus à risque que les autres … Pensons par exemple à des personnes pour qui les euros n’existent pas aujourd’hui : une dame de 95 ans, qui a déjà eu un peu de mal avec les nouveaux francs, n’est pas armée face aux arnaques qui jouent sur la confusion entre euros et francs. Les personnes âgées sont le plus souvent a priori extrêmement méfiantes. Donc, par exemple, elles ne vont pas ouvrir leur porte à n’importe qui, d’autant qu’on leur recommande instamment de ne pas le faire. Mais en même temps, une fois que cette première barrière a pu être franchie, toutes les résistances tombent et les personnes vont se trouver très démunies face à des démarches malveillantes ». La Miviludes identifie plusieurs situations potentiellement risquées : dans les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux (la Miviludes a ainsi été saisie par des établissements d’accueil s’interrogeant sur l’accès de l’établissement à des groupes d’inspiration philosophique ou spirituelle pouvant constituer un point d’entrée pour des sollicitations ultérieures de nature financière) ; dans le domaine de la santé (cas de « pseudo-guérisseurs » déjà signalés par la Miviludes en 2001) ; les personnes âgées vivant en milieu sectaire. Pour améliorer la protection de nos anciens, la Miviludes formule plusieurs propositions : renforcer le rôle du conseil de la vie sociale de l’établissement en intégrant les associations agréés qui assurent la défense des personnes malades et des usagers du système de santé ; interdire à tout bénévole (en tant que personne physique assurant directement l’aide au domicile) et à toute association non reconnue d’utilité publique intervenant au domicile des personnes âgées de pouvoir bénéficier de dons, legs et avantages financiers de toute nature de la part de la personne visitée ; sensibilisation des directeurs d’établissements, des personnels médico-sociaux et des gérants de tutelle au risque sectaire ; mesures pour que les établissements et les services destinés à des publics vulnérables soient soumis d’office aux exigences prévues par la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 (dite « loi rénovant l’action sociale et médico-sociale » qui encadre les établissements et les services, notamment sous la forme d’un agrément qui comporte des précautions et garanties utiles) ; campagne d’information et de sensibilisation aux risques sectaires dans les centres locaux d’information et de coordination (CLIC). Il souhaite connaître les intentions du Gouvernement sur ce sujet important qui doit être aussi jugé à l’aune du vieillissement de la population.
Réponse du ministère : Personnes âgées et autonomie
parue au JO le 07/01/2014
Le rapport de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) de 2011-2012 a appelé à une vigilance particulière à l’égard des personnes âgées et des personnes en fin de vie pour éviter le risque de détournement de ces patients vulnérables vers un mouvement sectaire. La prise en compte de la fragilité des personnes âgées et la nécessité d’améliorer l’accompagnement des personnes en fin de vie sont actuellement deux priorités gouvernementales. En effet, dans le cadre de la préparation de la loi d’adaptation de la société au vieillissement, annoncée par le Président de la République, des réflexions sont en cours notamment sur la nécessité de mieux affirmer et protéger les droits des âgés. Il importe à ce titre de veiller à anticiper et à prévenir la perte d’autonomie, tout en prévenant tout risque de maltraitance. Tout d’abord, dans le cadre des travaux du comité national pour la bientraitance et les droits des personnes âgées et des personnes handicapées (CNBD), a été préconisée la mise en place d’une cellule départementale de recueil des informations préoccupantes concernant ces publics. Ce dispositif, en cours d’expérimentation dans quelques départements, devrait permettre aux autorités administratives compétentes, notamment les services du département et de l’agence régionale de santé (ARS), de coordonner le signalement et le traitement de ces situations. Prenant en compte les propositions de la MIVILUDES, l’un des objectifs de la loi autonomie sera de mieux accompagner les personnes prises en charge en s’assurant du caractère libre et éclairé de leur consentement et à éviter plus largement les dons et legs abusifs à des sectes. Afin de développer la prévention et la lutte contre les dérives sectaires, devrait être lancée en 2014 une action de sensibilisation des professionnels des établissements et services sociaux ou médico-sociaux prenant en charge des personnes âgées. Enfin, le rapport sicard « penser solidairement la fin de vie » rendu le 18 décembre 2012, propose notamment d’améliorer le dispositif réglementaire de la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie (loi Léonetti) en définissant le rôle et les missions de la personne de confiance et précisant les directives anticipées. Il propose des mesures de sauvegarde pour garantir le respect des droits et de la dignité du patient en inscrivant la désignation de la personne de confiance et les directives anticipées dans le parcours de santé des personnes comme un projet de soins entre le médecin et son patient. Le comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE) a été saisi récemment par le Président de la République pour se prononcer notamment sur les conditions pour recueillir et appliquer ces directives anticipées. Dans son avis n° 121 « fin de vie, autonomie de la personne, volonté de mourir » du 30 juin 2013, le CCNE émet plusieurs recommandations et considère que la réflexion sur la fin de vie doit se poursuivre sous la forme d’un débat public.