Pour évoquer le danger des groupes et du communautarisme, on parle beaucoup des sectes, des réseaux intégristes, mais aussi de groupuscules idéologiques divers et variés. Cependant, les processus à l’origine de ces "mouvements" sont communs, fondamentalement, à ceux de structures et d’institutions plus acceptées par la société, et qui apparaissent plus de l’ordre de la culture dominante, comme les partis politiques ou encore les religions organisées, pour des formes très structurées et hiérarchisées, mais encore les divers mouvements syncrétiques regroupant certaines tendances culturelles de la société, qu’elles soient spirituelles, intellectuelles, corporatistes ou autres.
Afin de bien discerner et de comprendre les enjeux liés à l’existence et à la survie de ces "mouvements", je propose en fin d’article une petite "linkographie", non exhaustive, vers des éléments de réflexion sur la question, ouvrant à la fois sur l’individuel et le collectif.
Quelles sont les caractéristiques de ces "mouvements" et quels en sont les points communs ? Voici quelques principes, que j’ai décidé de chiffrer, pour la clarté (mais le chiffre, arbitraire, n’est pas important), afin d’engager la réflexion sur les processus à l’oeuvre dans nos sociétés dans le domaine de la pensée, le "mouvement" étant considéré comme cohésion d’acteurs individuels autour d’idées ou de projets communs.
Petite dialectique du "mouvement"
1- Il y a toujours une (ou plusieurs) personne(s) au centre du mouvement, le symbolisant.
2- Le mouvement cherche le plus souvent à avoir un impact le plus large possible et utilise pour cela des techniques de communication et les technologies nouvelles pour diffuser ses idées (parfois en plusieurs langues).
3-Le mouvement appelle toujours à la participation volontaire des personnes, pour la bonne cause, le bien-être de tous.
4- Le mouvement peut se résumer à quelques idées essentielles, partant souvent de bonnes intentions, mais dans un raisonnement simpliste et n’intégrant pas, le plus souvent, la complexité du réel.
5- Le mouvement appelle à agir à travers lui, proposant des actions collectives destinées à sa survie, ou alors à sa visibilité momentanée dans la sphère publique.
6- Le mouvement peut se nourrir du bénévolat de ses membres, créer ses propres moyens économiques de subsistance ou être un micro-mouvement (en direction d’un événement bien particulier).
7- Le mouvement et la (ou les) personne(s) le représentant parlent d’une seule voix (identification et personnification de la (ou des) personne(s) au mouvement). Des porte-paroles et des animateurs intermédiaires peuvent apparaître, selon la taille et l’organisation de sa structure.
8- Le mouvement s’inscrit souvent dans un langage culturellement défini ou volontairement multiréférentiel. Il génère une forme dans l’imaginaire social, aisément repérable par certains préceptes, slogans et/ou symboles.
9- Selon l’impact émotionnel, intellectuel ou psychologique qu’il inspire chez ses participants, le mouvement est considéré assez souvent comme "groupe", dans lequel les personnes s’identifient assez aisément ("membres du groupe"), et qui est à l’origine d’un certain sentiment d’appartenance et de sécurité psychologique et/ou matérielle associée.
10- Le mouvement fait partie, et est acteur, de la fragmentation culturelle du monde moderne et peut parfois dériver vers des types de pensée globalitaire et réductionniste qui n’étaient pas forcément présents ou tout au moins visibles au départ.
11- Le mouvement est une tentative bien souvent de dépassement de soi pour son (ou ses) fondateur(s) et peut être vécu consciemment ou non comme tel par ses membres et/ou par les personnes participant à ses activités.
12- Le mouvement est une forme éphémère, statique ou évolutive, qui peut parfois se transformer, modifier son image, son nom ou son (ou ses) représentant(s) au cours du temps.
13- Le mouvement est une activité culturelle et est un produit de la pensée humaine. A ce titre, il bénéficie de la considération, du rejet, de l’acceptation, ou de l’indifférence des autres mouvements et activités culturelles.
14- Le mouvement s’inscrit toujours dans la durée, par sa forme ou ses motivations.