Le fondateur de l’Église de l’unification, plus connue sous le nom de « secte Moon » est mort le 3 septembre. Ce type de mouvements, dont certains sont à l’origine de dangereuses dérives, s’inscrit dans des contextes sociaux, culturels et économiques très précis.
« Quand, très vite après sa naissance, un groupe religieux prend de l’ampleur, c’est tout d’abord parce qu’il est globalement bien accueilli dans la société. En ce sens, il répond à une demande, correspond à un manque ressenti par un groupe d’individus.
Si l’on prend l’exemple de l’Église de l’unification, plus connue sous le nom de « secte Moon », il faut se souvenir qu’elle fut fondée en 1954. À cette époque, la Corée sort tout juste d’une guerre fratricide, et le fondateur, Sun Myung Moon, arrive de Corée du Nord.
Au tout début, son discours est fondé sur le fait que la Corée du Sud est un pays élu par Dieu, et que cette prédestination aboutira à l’envolée économique de la Corée du Sud, et finalement, à une réunification du pays. Ce groupe n’est alors considéré en rien comme une secte.
Un « goût religieux » d’une société à l’autre
En Corée du Sud, la secte Moon a connu un fort succès dans les années 1970, puis son influence a largement décru. Cela s’explique en partie par le fait que son fondateur est devenu puissant dans le pays, au point d’inquiéter la classe politique. Finalement, la crise économique de 1997 a porté un coup dur à l’idée même que la Corée était le pays élu. Par conséquent, la théologie de la prospérité a perdu sa crédibilité et les Églises qui la prêchaient ont été peu à peu perçues comme des sectes.
La secte s’inscrit dans un contexte économique, historique, culturel. Elle correspond d’abord à des besoins matériels, séculiers, auxquels elle apporte une solution religieuse. Certains groupes dérangent dans certaines sociétés, mais peuvent être acceptés dans d’autres. C’est ce que l’on appelle le goût religieux, qui est différent selon les classes sociales, et selon les régions du monde. En Europe, on voit prospérer de nouveaux mouvements religieux, dont certains sont également considérés comme des sectes.
S’ils prospèrent, c’est qu’il y a une forte aspiration au bonheur, qui se confond souvent avec des discours qui tiennent en une expression : « Ne pas rater sa vie » . Les mouvements new age, ou d’inspiration bouddhiste assouvissent cette soif de bien-être.
« Colonisation des âmes »
Lorsqu’un mouvement défend l’idée que le pays dont il est originaire est le pays élu par Dieu, son extension internationale peut inquiéter. Ainsi s’installe l’idée d’une colonisation des âmes, la peur d’une conversion massive. Le groupe apparaît alors comme un cheval de Troie. Dire cela ne revient évidemment pas à nier l’existence de dérives dangereuses : des dérives thérapeutiques, sexuelles ou économiques sont régulièrement dénoncées.
Plus grave encore est la fermeture complète du groupe, qui se caractérise par une coupure des adeptes dans les domaines de l’économie (aliénation des biens), de la famille (isolement familial) et du vocabulaire (utilisation d’un langage incompréhensible pour le non-initié). Heureusement plus rare, elle aboutit à des situations explosives. C’est le cas de l’ordre du Temple solaire, impliqué dans un certain nombre de suicides collectifs, notamment en Suisse en 1994 et dans l’Isère en 1995. »
(1) Auteur de Individus et pouvoirs face aux sectes, Armand Colin, 2008, 279 pages, 33 €
source :
http://www.la-croix.com/Religion/Approfondir/Spiritualite/Pourquoi-certaines-sectes-prosperent-elles-_NP_-2012-09-07-850911
LA CROIX le 7/9/12
RECUEILLI PAR LOUP BESMOND DE SENNEVILLE