{{RAPPEL Le Parisien, 2 février 2007 par Jean-Marc Ducos}}
Belberaud (Haute-Garonne) DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
Côté face, Claude David, 66 ans, était le docteur en psychologie et psychanalyste des beaux quartiers de Toulouse. Côté pile, c’était le gourou d’une communauté d’une trentaine de personnes, l’association les Gens de Bernard, installée dans un château de brique rouge un peu à l’écart du village de Belberaud.
Un univers où il régnait en maître grâce à un redoutable système d’enfermement : des psychanalyses truquées, des humiliations, sans oublier les violences quotidiennes sur les femmes et les enfants. Ses fidèles, qui n’étaient pas séquestrés et travaillaient à l’extérieur du château, devaient lui assurer un revenu confortable et lui offrir des cadeaux.Il lui est aussi reproché d’avoir projeté des films pornographiques aux adolescents résidant sur place avec leurs parents.
Arrêté par les gendarmes, Claude David a été mis en examen pour « agressions sexuelles sur mineurs », « abus de faiblesse aggravé », « violences habituelles sur mineurs », « abus de confiance » et « violation du secret professionnel ». Il est aujourd’hui incarcéré à la maison d’arrêt de Seysses.
Le praticien s’était déjà trouvé en délicatesse avec les autorités administratives et judiciaires dans le milieu des années 1980 à Nantes (Loire-Atlantique), où il avait fondé un centre de soins pour autistes en rachetant le château de Clermont, l’ancienne propriété du comédien Louis de Funès.
Le docteur David avait à l’époque fait faillite. En 2005, c’est le témoignage d’un adolescent devant le juge des affaires familiales de Toulouse qui a lancé les gendarmes sur la trace du psychanalyste. Ce garçon disait ne plus supporter voir son père dans l’ambiance du château. Et pour cause. « Les enfants redoutaient Claude David car des coups étaient portés et il y avait pire… », assure Simone Rich, l’infatigable responsable des missions antisectes de la région Midi-Pyrénées. « Les témoignages font part d’attouchements sur des garçons mineurs », confirme le procureur de Toulouse, Paul Michel. Simone Rich a pris en charge les victimes sorties de « cet enfer de la psychanalyse ouverte, où la vie de chacun était révélée aux autres dans le but de les rendre dépendants de Claude David ».
{{« Un stratège redoutable »}}
Le psy avait la main leste. Il décochait notamment gifles et coups dès que les membres de la communauté oubliaient de « nourrir ses perroquets ». Décrit par ses victimes comme « un stratège efficace et redoutable », il excellait surtout dans la manière de vivre à leurs crochets.
Chaque membre de la communauté devait payer un loyer pour occuper une chambre du manoir de Belberaud, mais aussi les diverses cotisations aux associations fondées par le psychanalyste et les séances d’analyse.
En vingt ans, l’une des victimes lui a versé 170 000 € pour des séances d’une durée de dix minutes à raison de deux ou trois fois par semaine. « On est dans la logique d’une dérive sectaire et l’aspect financier doit être approfondi », insiste le procureur. Claude David « aimait qu’on l’aime », selon Simone Rich. Il savait suggérer à ses fidèles les cadeaux indispensables à son statut : montre de prix, moto, tableaux, antiquités, sculptures, matériel télé et hi-fi de grand prix. Sa dernière lubie, les voitures Smart, qu’il revendait aussitôt au prix fort à ses fidèles, obligés de s’endetter. « Un véritable racket », résument les enquêteurs.
Au château, les partisans de Claude David crient « au complot des confrères psychanalystes » et au
« règlement de comptes ». L’avocate du détenu, sollicitée à plusieurs reprises, n’a pu être jointe, mais elle réfute le terme de secte pour qualifier cette communauté.