Partie civile dans ce procès aux côtés de son époux, de cinq anciens disciples et de l’Union nationale des associations de défense des familles et de l’individu victimes de sectes (UNADFI), Mme Lorenzato avait rejoint en 1984, avec son mari, le groupe de Robert Le Dinh, alors qu’elle n’avait que 19 ans.

“Il était Dieu, la vérité (…) C’est lui qui a choisi nos métiers, le moment de faire nos enfants”, a décrit cette greffière de cour d’appel à propos de celui qui se faisait appeler “Tang” mais aussi “le roi des rois” ou “le grand monarque”.

“Je l’ai rencontré à 19 ans alors que j’étais dans une recherche spirituelle pour combler un vide familial. J’ai toute de suite été prise dans les mailles du filet. Il me persuadait que lui seul pouvait me sauver de la souffrance que j’avais en moi (…) L’extérieur, c’était le mal. Nous étions enfermés dans une prison mentale, totalement annihilés”, a poursuivi Isabelle Lorenzato en évoquant “l’atmosphère de peur continuelle” qui régnait dans le groupe.

Abordant les diverses “missions sexuelles” imposées par Robert Le Dinh, l’ancienne adepte a déclaré qu’il s’agissait d’une “mécanique pour purger les fautes de (son) enfance”, d’un “travail à exécuter pour être heureuse”.

“J’avais honte, mais je le faisais quand même. J’étais un objet, une marionnette. Quand on est à l’intérieur du groupe, il y a une telle emprise, une telle manipulation mentale que l’on n’est plus soi-même. Aujourd’hui encore, alors que j’en suis sortie, que je sais que Tang est un être vide, sans aucun pouvoir, un escroc, la peur m’habite toujours”.

Après avoir passé 22 ans et sept mois “sous l’emprise” de Le Dinh, cette ancienne adepte et son mari, douanier et pompier volontaire, avaient dénoncé en avril 2007 les agissements de leur guide spirituel auprès des gendarmes de Saint-Girons (Ariège). Mis en examen en septembre 2007 pour viols et agressions sexuelles aggravés, ainsi qu’abus de faiblesse aggravé, Tang a été condamné le 18 septembre 2010 à 15 ans de réclusion criminelle par la cour d’assises de l’Ariège.

Né en 1959 à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), ce fils d’ouvrier bouddhiste d’origine vietnamienne et d’une mère française catholique dit avoir reçu un message divin du Christ en 1982 faisant de lui “le troisième Messie”. Après cette “révélation” et pour dispenser son “enseignement mystique chrétien”, Robert Le Dinh a formé en 1984 une communauté “pour sauver le monde” à Madaillan (Lot-et-Garonne) qui s’est par la suite déplacée, en 2005, à Bonac-Irazein, près de Castillon (Ariège).

Durant vingt ans, le groupe de Tang a également donné naissance à diverses associations caritatives ou humanitaires telles que l’ADLEIF (Association de défense des libertés d’expression dans l’institution française), citée dans un rapport parlementaire sur les sectes en 1995. Tang et son groupe ont également fait l’objet d’une mention dans le rapport 2010 de la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires).

Dès le début de son procès, Le Dinh a contesté tous les faits qui lui sont reprochés. Assumant d’être “un libertin”, il a notamment assuré que les relations sexuelles qu’il avait pu avoir avec des membres de son groupe, exclusivement des femmes, étaient “parfaitement consenties”. Concernant les abus de faiblesse et les sommes d’argent que les parties civiles disent lui avoir versées au prix de “grands sacrifices”, il assure n’avoir “jamais rien soutiré à qui que ce soit”. AP

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(AP / 02.04.2012 17h46)