Si on a si peur que les convictions religieuses teintent les prises de position, est-ce à dire que seuls les athées ont droit de s’exprimer?
L’Opus Dei est une institution laïque de l’Église catholique. Ce sont donc des personnes laïques qui en font partie. Ses membres y reçoivent une éducation sur la foi tant sur le plan intellectuel que spirituel. Chacun pense et réfléchit sa foi. L’institution comme telle n’a pas d’autre raison d’être que de l’outiller pour vivre sa foi dans son individualité et avec sa propre personnalité. On n’accepterait pas de se faire dire quoi penser, comment agir ou ne pas agir. Si c’était le cas, personne n’en voudrait, ce qui n’est pas le cas.

L’accent est surtout mis sur la responsabilité personnelle lorsqu’on parle de formation dans l’Opus Dei. Personne ne se fait dire et ne peut dire à qui que ce soit de prendre une couleur politique déterminée ou une ligne d’action sociale ou culturelle particulière. Ceci explique pourquoi aucun membre ne peut s’approprier de représenter l’Opus Dei, car comme institution, elle n’a pas de ligne d’action autre que d’aider les chrétiens à être cohérents avec leur foi en la vivant dans la vie courante. Le seul qui peut parler au nom de l’Opus Dei est le prélat et les vicaires des différentes circonscriptions géographiques où oeuvre l’Opus Dei, directement ou à travers leur porte-parole.

Quand on arrive à un sujet qui relève de la loi naturelle et donc du code moral judéo-chrétien, ce n’est pas non plus l’Opus Dei qui dicte aux membres comment penser et quoi faire sinon l’enseignement de l’Église catholique clairement exposé dans le Catéchisme de l’Église catholique (révisé et publié en 1992 par le pape Jean-Paul II). Les membres de l’Opus Dei, comme beaucoup de catholiques, y adhèrent en pleine connaissance de cause et en toute liberté et responsabilité personnelle.

Pas de motif caché

On reproche à l’Opus Dei de ne pas divulguer la liste de ses membres et de là, bien souvent lui vient l’étiquette d’association secrète. Les membres individuellement sont totalement libres de dire leur appartenance à l’Opus Dei à qui que ce soit. La non-divulgation de la liste de ses membres relève du respect de la vie privée de chaque individu. Il ne devrait pas être difficile de comprendre cette manière d’agir puisqu’elle est pratique courante dans nombre d’associations culturelles et professionnelles. Aucun médecin ne donnerait la liste de ses patients au journaliste ou à quiconque appellerait à son bureau pour obtenir cette information. Cela relève du sens commun.

Il n’y a pas de motif caché derrière cela, sinon la conviction que la foi relève du domaine privé et que chacun en parle de la façon et dans les circonstances qui lui semblent appropriées. Les membres seront heureux de parler de leur appartenance à l’Opus Dei avec les personnes avec qui elles ont un rapport personnel de confiance.

Revenons-en à l’article en question et au malaise soulevé au sujet de ces médecins qui ont présenté leurs mémoires en commission parlementaire. Devaient-ils révéler leur appartenance à l’Opus Dei, si appartenance il y avait ? Non. Ils n’y sont pas allés en tant que représentants de l’Opus Dei puisqu’ils ne peuvent pas le faire comme nous l’avons expliqué précédemment.

Pour mieux nous mettre en contexte, posons-nous la question suivante : est-ce qu’un juif doit révéler sa religion et la synagogue dont il est membre ? Est-ce qu’un protestant doit dire à quelle branche il est affilié ? Est-ce qu’un catholique doit dire qu’il appartient aux Focolari, à Communion et Libération, aux Chevaliers de Malte, aux Chevaliers de Colomb, à l’ordre du Saint-Sépulcre, à Marie-Jeunesse, ou à la communauté de L’Emmanuel ? Devraient-ils commencer un mémoire à l’Assemblée nationale avec une telle introduction ? La réponse est évidente.

Et pourquoi alors faudrait-il qu’un catholique mentionne qu’il fait partie de l’Opus Dei ? Pour pousser plus loin l’exemple, est-ce qu’un athée devrait dire qu’il est athée avant de parler en commission parlementaire sur sa position sur l’euthanasie ?

Peur des convictions

Au coeur de toute cette question est la peur que les convictions religieuses teintent les prises de position. À ce prix, seulement les athées auraient pleinement droit au débat sur la place publique. Ils apportent pourtant eux aussi leurs couleurs particulières et leur conception de l’être humain. La neutralité est une construction idéologique et une illusion. Il est évident que chaque personne arrive avec son bagage d’éducation, de valeurs, de lectures, etc.

L’Opus Dei a un objectif exclusivement spirituel. Il n’est pas un groupe de pression, ni un lobby. S’il l’était, les journalistes auraient raison de dénoncer qu’il y a secret et que ses membres manquent de transparence. Mais puisqu’il ne l’est pas, il était tout à fait normal que les membres de l’Opus Dei n’aient pas à divulguer cette information avant de parler.

source : Le Devoir
1 novembre 2013 | Isabelle Saint-Maurice – Porte-parole de l’Opus Dei au Canada |http://www.ledevoir.com/societe/ethique-et-religion/391461/l-opus-dei-n-est-pas-un-lobby