Prophète inspiré ou gourou pervers, il est jugé pour le viol de ses adeptes

Par Emmy VARLEY

TOULOUSE, 8 sept 2010 (AFP) – Gourou usant de sujétion mentale pour violer ses adeptes ou chef de communauté inspirant l’affection de ses ouailles ? Les assises de l’Ariège jugent à partir de vendredi à Foix un homme de 51 ans accusé de viols sur personnes vulnérables et agressions sexuelles sur mineures.
Robert Le Dingh, dit Tang, se défend d’être le gourou d’une secte, évoque des relations sexuelles consenties avec les adultes et dément toute agression sur mineure.
Ce père de six enfants, fils d’une mère française catholique et d’un père d’origine vietnamienne bouddhiste, dispensait des enseignements quotidiens à une vingtaine de personnes, d’abord dans le Lot-et-Garonne, puis à partir de 2005 à Bonac-Irazein dans l’Ariège.
Disant avoir reçu en 1982 une révélation du Christ lui demandant de venir en aide aux défavorisés, Tang organisait des conférences et débattait avec les membres de la communauté des prophéties qu’il recevait.
L’affaire avait éclaté en avril 2007 lorsqu’un couple d’anciens adeptes, Dominique et Isabelle Lorenzato, un douanier et une greffière, avaient dénoncé aux gendarmes l’existence de ce qu’ils décrivaient comme une secte et les pratiques de son chef. Six autres parties civiles les ont ensuite rejoints.
Celles-ci affirment que l’accusé se présentait comme porteur d’une mission divine et imposait aux femmes des rapports sexuels qu’elles acceptaient par peur de ce qu’il appelait la “loi du retour” : des malheurs pour elles ou leurs proches en cas de désobéissance.
Son ascendant était tel qu’il conseillait les adeptes dans leur carrière ou constituait les couples, rapportent des témoins. Pour les parties civiles, Tang inspirait une crainte et une déférence telles qu’elles n’avaient d’autre choix que d’accepter des relations sexuelles.
Parmi les parties civiles figurent deux filles d’adeptes, qui l’accusent d’attouchements alors qu’elles étaient mineures. Tang dément formellement et concède au plus un baiser dans un élan d’euphorie réciproque.
Tang, condamné à deux ans et demi de prison en 1984 notamment pour extorsion de fonds, est aussi accusé d’avoir fait financer son train de vie par les membres du groupe.
Entre 2005 et 2007, environ 150.000 euros auraient été versés sur les comptes de l’accusé, qui aurait également perçu près de 80.000 euros en chèques tout en déclarant comme revenus imposables pour 2005 et 2006 environ 8.000 euros.
Pour les parties civiles, le caractère sectaire du groupe de Tang, qui comparaît libre après deux ans de détention provisoire, ne fait aucun doute.
“C’est un problème de manipulation mentale et d’emprise”, commente Me Denis Picotin, conseil du couple Lorenzato. C’est un prédateur, qui ne travaille pas et vit de sa secte. Il est clairement établi que c’est un manipulateur pervers”.
“On ne s’appartenait plus”, renchérit Isabelle Lorenzato. “On n’avait plus de libre arbitre, plus de pensée individuelle. Il allait jusqu’à choisir les prénoms de nos enfants”.
La défense, elle, va plaider l’acquittement. “Il ne s’agit absolument pas d’une secte” mais d’un “groupe à caractéristique religieuse, aux pratiques légères et libres”, dont les membres “ont bénéficié d’un enrichissement personnel et matériel” dit Me Pierre Le Bonjour. “A partir de là, les pseudo victimes vont avoir du mal à justifier de la contrainte”.
L’accusé “n’a jamais revendiqué de statut quel qu’il soit”, poursuit Me Le Bonjour. C’est un homme qui a eu “beaucoup de succès” auprès des femmes et qui est peut-être la victime du syndrome “du professeur de faculté courtisé par ses étudiantes” au risque de susciter “jalousies et tensions”.
Le verdict est attendu le 18 septembre.
ev/lal/jpa
AFP 081025 SEP 10