Le 8e congrès mondial de la psychothérapie se tient à Paris du 24 au 27 juillet. Interview du Dr Pierre Canoui, Président de la Fédération Française de psychothérapie et de psychanalyse pédospychiatre, psychopraticien, docteur en éthique médicale et organisateur du congrès.
À l’heure du 8e colloque mondial de la psychothérapie, comment définir « la » psychothérapie ?

Il n’y a pas une mais « des » psychothérapies. Il existe environ 400 méthodes, techniques, théories différentes, qu’on peut classer en six catégories. Les psychothérapies psychanalytiques, humanistes (existentielles, Gestalt), corporelles (hypnose, EMDR…), familiales, cognitivo-comportementales transculturelles, ou bien basées sur le psychodrame (expression théâtrale ou artistique). Et d’autres encore, innovantes, que l’on va découvrir lors du congrès, comme la thérapie « communautaire », créée par le professeur brésilien Adalberto Barreto et testée dans la favela de Pirambu (Brésil). Son objectif est d’utiliser les ressources propres des habitants qui sont psychothérapeutiques pour les personnes du groupe en souffrance psychique.

Ces 400 psychothérapies ont-elles des points communs ?

C’est la grande question que l’on va se poser lors du colloque. Existe-t-il un corpus commun à toutes ces thérapies ? Aucune étude n’a démontré la supériorité d’une technique par rapport à une autre, dans l’absolu. Il semble donc clair que ce qui prime avant tout ce n’est pas la méthode mais la relation elle-même et ce qui se tisse entre le patient et le praticien de la psychothérapie. La psychothérapie est actuellement une co-construction entre le patient et le praticien. Il est important de protéger les patients vulnérables des dérives sectaires et “des gourous de la psychothérapie”. Pour cela, il convient de s’adresser à des thérapeutes certifiés par une fédération, par exemple la Fédération française de psychothérapie et psychanalyse , qui adhèrent à une charte éthique. Il faut absolument éviter les électrons libres, qui sont la porte ouverte à des dérives, sectaires notamment.

Il n’y a réellement pas de méthodes plus efficace que d’autres ?

Non, chez certaines personnes c’est le psychodrame qui fonctionne (chez certains adolescents notamment) tandis que pour les victimes d’attentats et présentant un psychotraumatisme l’EMDR (thérapie basée sur le mouvement pendulaire des yeux) est une méthode très intéressante. L’une des explications possibles est que l’humain est si complexe qu’une seule théorie, une seule méthode ne peut suffire. Les formes de thérapie ont changé, il existe également des thérapies brèves, elles n’ont plus besoin d’être longues pour être efficaces. Les psychopraticiens que nous certifions à la FF2P ont un large aperçu des méthodes, ce qui leur permet d’orienter vers une autre méthode s’ils jugent que la leur n’est pas adaptée aux patients ou n’apportent pas les résultats escomptés.

En résumé, la psychothérapie a changé…

Oui, les patients ne demandent plus seulement l’amélioration des symptômes, mais de guérir des blessures de la vie, de s’adapter à la société et in fine de trouver un sens à leur existence. L’exemple le plus frappant est la recrudescence de demandes suite au burn out professionnel. C’est pourquoi, nous constatons que la psychothérapie sort de la médecine pour entrer dans un champ médico psycho-social avec une demande de bien être mais aussi de réflexion philosophique existentielle et parfois spirituelle.

La France est-elle favorable à ce changement ?

La discipline, longtemps fermée à cette évolution commence à l’amorcer. Ce congrès témoigne de cette évolution. Il faut faire bouger les mentalités !

source :

https://www.sciencesetavenir.fr/sante/la-psychotherapie-sort-du-champ-de-la-sante-mentale-pour-entrer-dans-celui-du-bien-etre_115048