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LE NOUVELLISTE (Canada) / 24 mars 2010
(Trois-Rivières) Comme toutes les ressources en toxicomanie de la province offrant de l’hébergement, Narconon de Trois-Rivières devra montrer patte blanche pour obtenir la certification du ministère de la Santé et des Services sociaux, obligatoire à partir du 1er juillet 2011.
En effet, au lendemain de la sortie publique de David Edgar Love, un ancien patient devenu intervenant qui dénonce certaines techniques utilisées par le centre, l’Agence de santé et de services sociaux de la Mauricie assure qu’elle aura Narconon à l’oeil.
«Dans le cadre de la loi 56, qui prévoit l’élargissement de la certification obligatoire des résidences pour personnes âgées à tous les organismes oeuvrant en désintoxication, des inspections rigoureuses seront faites pour encadrer et garantir la sécurité et la qualité des services», a annoncé Marc Lacour, directeur des services sociaux.
Ainsi, les 14 organismes de la région devront faire une demande et se conformer à toutes les exigences du MSSS avant juillet 2011. Celles-ci touchent notamment les méthodes d’intervention, les aménagements physiques, la sécurité, la formation des employés, et pourraient même s’étendre jusqu’aux affiliations à une religion ou à une orientation spirituelle quelconque visant à les interdire.
On sait en effet que Narconon a des liens avec l’Église de scientologie. Les méthode d’intervention sont basées sur les enseignements de Ron Hubbard, le fondateur de l’Église de la scientologie.
À ce sujet, Marc Bernard, directeur général de Narconon, tient à préciser qu’en dépit de ce lien, Narconon n’est pas un centre de propagande où la pratique de la scientologie est obligatoire ou recommandée.
«Ici, nous acceptons toutes les couleurs, toutes les races, toutes les religions. Sur les 30 employés que nous avons, 4 à 5 seulement font partie de l’Église dont moi, je l’avoue. Je n’ai pas de cachette à faire. En ce qui concerne les patients, nous ne leur parlons pas de ça. Nous respectons les droits de la personne avant tout. La preuve en est que nous avons accueilli ici des bouddhistes, des protestants, des musulmans, des catholiques, etc.» a-t-il expliqué.
Il déplore d’ailleurs que Narconon se trouve régulièrement sur la sellette pour ses liens avec la scientologie. «Ce sont des attaques gratuites et inutiles qui proviennent souvent d’individus qui ne connaissent même pas le centre. Ils ne sont pas venus nous visiter et nous rencontrer. D’autres veulent nous nuire, car ils pensent que nous sommes assis sur une mine d’argent et que Tom Cruise se balade dans le centre», a-t-il ajouté, non sans ironie.
Depuis 2001, le centre s’est en effet retrouvé dans la controverse plus d’une fois. Le plus récent exemple est la sortie publique de David Edgar Love qui a porté plainte à la Commission des droits de la personne et à la Commission des normes du travail pour harcèlement et menaces et qui en a profité pour lever le voile sur certaines techniques d’intervention.
M. Bernard a refusé de commenter les accusations de M. Love, car celui-ci serait en processus de règlement avec Narconon. Il tient cependant à apporter certaines précisions sur les techniques d’intervention, notamment la purification qui consiste à absorber des vitamines et à passer plusieurs heures dans un sauna.
«Le sevrage consiste notamment à remplacer la drogue par des doses de vitamines balancées et à purifier son corps pour reconstituer le système mais le tout se fait avec l’approbation d’un médecin», a-t-il expliqué.
M. Bernard apporte aussi des précisions sur l’exemple du «cendrier». M. Love a en effet soutenu qu’il devrait crier «Lève-toi» et «Assis-toi» jusqu’à ce que le cendrier obéisse tout seul.
«Voyons donc! Nous ne leur demandons pas de faire de la magie. Le cendrier fait partie d’une série de neuf exercices dans un cours de communication. C’est un cendrier mais cela pourrait être n’importe quel objet. L’objectif est d’amener le client à donner une intention réelle à ses mots et non pas seulement à les prononcer.»
Des ex-employés portent plainte
Une dizaine d’ex-employés du Centre Narconon à Trois-Rivières ont porté plainte à la Commission des normes du travail parce qu’ils n’auraient pas été rémunérés pour des heures travaillées.
Toutefois, selon l’un de ces ex-employés, Richard Lussier, ils seraient au moins 25 personnes dans la même situation.
«C’est vraiment plate car Narconon profite du monde sans défense pour se remplir les poches. J’ai dû porter plainte à la Commission des normes du travail pour que mon dossier avance. Moi, je ne veux pas de trouble; je veux juste mon argent. Je sais par contre que bien d’autres employés n’ont pas porté plainte. En tout, nous sommes plus de 25 à ne pas avoir été payés ces derniers mois», a déclaré M. Lussier.
Ce dernier, qui avait été embauché comme cuisinier, a été congédié le mois dernier. «Narconon me doit entre 1200 $ et 1300 $.
C’est beaucoup quand on a un loyer à payer. J’ai parlé fort pour avoir mon dû car ce n’était pas la première fois que ça arrivait mais on a préféré me congédier», a-t-il raconté.
M. Lussier admet avoir reçu quelque paies comme par exemple un 100 $ aux deux ou trois semaines. «Le centre nous en donne un peu pour nous fermer la trappe, nous promet mer et monde mais sans jamais nous donner une paie complète», a-t-il déploré.
Marc Bernard, directeur général de Narconon, reconnaît que des ex-employés n’ont pas été payés.
«Je crois qu’une dizaine de plaintes ont été portées contre nous. La récession nous a fait mal. Nous avons donc accumulé un peu de retard dans les paies. Je peux vous assurer que ces gens seront payés, et ce, le plus rapidement possible. On ne prend pas ça à la légère», a-t-il mentionné.
Il estime cependant que ces ex-employés ont paniqué. «C’est le système qui veut ça, qui les a amenés vers les Normes du travail.
Pourtant, nous travaillons sans arrêt pour avoir suffisamment de sous pour régler nos dettes», a ajouté M. Bernard.
Rappelons que Narconon offre des thérapies d’une durée moyenne de trois à quatre mois. Selon M. Bernard, le centre accueille environ 35 à 40 clients aux trois mois.
Or, un ex-employé soutient pour sa part que le centre accueille tout au plus une vingtaine de personnes par année. La majorité de la clientèle vient de l’Ontario, de la Colombie-Britannique et de l’Alberta.
Qui plus est, les coûts de cette thérapie sont particulièrement élevés, s’élevant à plus de 5000 $ par mois environ, pour un total de 20 000 $.
«Combien coûtent les funérailles d’un toxicomane à votre avis? Plus de 12 000 $. En plus, nous avons ici un excellent taux de réussite: il se situe entre 70 et 76 % alors que la moyenne des autres centres est de 10 %», a précisé M. Bernard.
Présentement, une enquête est toujours menée par la Commission des normes du travail. On refuse d’en dévoiler davantage sur le nombre et le contenu des plaintes actuelles.
Cependant, le porte-parole Jean-François Pelchat ne cache pas que Narconon a un «lourd historique» en matière de plaintes depuis 2005.
«Un bon lot de plaintes ont été portées par des employés mais dans la plupart des cas, les dossiers sont terminés; soit que le centre a payé les avis de réclamation, soit qu’il y a eu entente, soit que la plainte n’a pas été retenue, soit que l’employé s’est désisté», a conclu M. Pelchat.