Amputée d’un bras par Roch Thériault

Malgré un parcours de vie marqué par d’innombrables embuches, dont l’amputation du bras droit à froid par Roch Thériault, Gabrielle Lavallée se consacre à transmettre aux autres un message d’espoir.

La femme de 60 ans qui, avec humour, aime dire qu’elle préfère vivre à son propre crochet qu’à celui des autres, a donné une conférence bouleversante, hier après, au Collège des Hauts Sommets de Saint-Tite-des-Caps.

Devant une soixantaine d’étudiants de secondaire IV et V en éthique et culture religieuse buvant chacune de ses paroles, Mme Lavallée a raconté comment elle a survécu à la série de malheurs qui ont meublé son existence.

«Je ne suis plus la femme qui ne s’aimait pas parce que je n’avais pas confiance en moi, étant manipulée par Roch ‘La crotte’ (comme elle le surnomme) Thériault. Ça m’a coûté un bras», confie d’elle d’entrée de jeu.

Née en 1949 à La Baie, au Saguenay, dans la pauvreté extrême, 12ème enfant d’une famille de 13, elle est rapidement placée à l’orphelinat local pendant les trois premières années de sa vie. À trois ans, on la réincorpore, non sans difficulté, dans sa vraie famille.

{{Mauvais début}}

Dès lors, elle sera confrontée à l’adversité. À 4 ans, elle est abusée sexuellement par son père qui meurt l’année suivante. Sa mère élève ses enfants dans la sévérité extrême, les privant même de s’amuser avec les voisins.

Malgré qu’elle termine ses études première de classe en techniques infirmières au Collège de Chicoutimi, Gabrielle Lavallée, ne se sent pas bien intérieurement.

{{D’infirmière à danseuse nue}}

Échecs amoureux et professionnels marqueront les années 1970. Voyageuse dans l’âme, durant quatre ans elle parcourt les routes du monde seule ou avec ses compagnons du moment, de l’Europe jusqu’aux Amériques, en pratiquant tantôt son métier d’infirmière, tantôt celui d’effeuilleuse dans un cabaret de Los Angeles.

«Si je suis devant vous, c’est que tout est en nous pour réussir. Grâce à la foi, je suis sortie d’un enfer inqualifiable. Il faut avoir confiance en soi. J’ai appris à me connaître pour me reconnaître. Ce n’est pas tout de réussir dans la vie, il faut réussir sa vie», poursuit la femme avec enthousiasme.

{{La fameuse rencontre}}

Ce cheminement non orthodoxe la mène en juillet 1977, à 27 ans, à Keswick, en Ontario, où se déroule une session d’été de croissance personnelle donnée par l’Église Les Adventistes du 7e jour. Elle y rencontre Roch Thériault, alias Moïse, leader d’un groupe sectaire en formation.

Commencent alors pour Gabrielle Lavallée 12 années d’un pèlerinage aux frontières de l’inacceptable qu’elle racontera dans L’Alliance de la brebis, et le film Moïse, l’affaire Roch Thériault, avec Luc Picard dans le rôle du gourou et Isabelle Blais, dans celui de Gabrielle Lavallée.

Ils se sont rencontrés dans un congrès sur les médecines douces à Toronto. Elle ne savait pas qu’elle venait de mettre les pieds en enfer.

{{Sous le joug d’un bourreau}}

Comment une femme instruite et autonome financièrement a-t-elle pu se retrouver sous le joug d’un tel bourreau?

«On n’entre pas dans une secte, on est happé par ces prédateurs, qui profitent de notre vulnérabilité et notre manque d’amour.»

Une fois à l’intérieur, difficile d’en sortir, voire impossible. Pour avoir tenté de fuir, pour s’être opposée à Moïse, Gabrielle Lavallée l’a payé très cher. C’est à froid que son gourou lui a tranché la main droite et l’a laissée sans soins pendant 19 jours.

«Le jour où Roch m’a mutilée, j’ai vu le diable dans les yeux», dit-elle.

{{En prison}}

Roch Thériault croupit toujours en prison. Dans quelques années, il sera complètement libre à la fin de sa sentence de 25 ans.

Thériault a eu 22 enfants avec les femmes qu’il tenait sous son emprise dont deux avec Gabrielle Lavallée. Le garçon est mort à l’âge de cinq mois du syndrome de mort subite et sa fille a aujourd’hui 26 ans.

«Je lui ai pardonné, mais je n’ai pas oublié, car, à la fin de la journée, je n’endure plus ma prothèse, Je suis rendue que je pris pour lui, car il est un enfant de Dieu», mentionne Gabrielle Lavallée.

L’Autre Voix le 26 Novembre 2010

Marc Cochrane

http://www.lautrevoix.com/Actualit%C3%A9s/2010-11-26/article-1996335/Tout-est-en-nous-pour-reussir-Gabrielle-Lavallee/1