Nicolas Bérubé

La Presse

Los Angeles

Faux noms, témoignages peu convaincants, rétractations: les autorités ont peine percer le mystère entourant la vie des membres de la secte Yearning for Zion, qui encourage la polygamie et le mariage entre personnes d’une même famille.

Parmi les centaines de membres interrogés, plusieurs ne s’identifient que par un prénom, alors que d’autres ont changé de nom, où ont eu de la difficulté à nommer leurs proches.

Un vrai fouillis, qui complique la plus grande audience concernant le droit de garde d’enfants de l’histoire des États-Unis. Plus de 300 avocats travaillent sur la cause et sont présents dans la salle d’audience de San Antonio, au Texas.

«Nous ne savons pas à quoi nous attendre, a déclaré John Kennedy, un avocat dont le cabinet représente quelque 80 mères. Notre plus grosse difficulté dans une affaire de cette taille et de cette ampleur est de faire en sorte que les droits de chaque personne soient protégés.»

Certains hommes de la secte ont dit qu’ils allaient participer aux tests, exigés hier par la juge Barbara Walther.

«Nous allons faire tout ce qu’il faut pour que les enfants regagnent la maison de façon pacifique», a expliqué un homme disant s’appeler «Rulan» au réseau CBS.

{{Les règles de la secte}}

Ce même homme a dit que le groupe songeait à changer ses pratiques, qui encouragent les hommes plus âgés à épouser des mineures pour fonder une famille.

«Plusieurs d’entre nous, peut-être, n’étaient pas au courant d’une telle loi, a-t-il dit. Et, oui, nous pouvons reconsidérer notre choix. Nous enseignons à nos enfants d’obéir à la loi.»

Stephen Singular, auteur du livre When Men Become Gods, qui porte sur la polygamie, n’en croit rien. Selon lui, les membres de la secte, qui fait partie de l’Église fondamentaliste des saints des derniers jours (FLDS), savent très bien ce qu’ils font en épousant des jeunes filles.

«Les membres de la secte se foutent depuis des années du gouvernement fédéral, de l’État, et des lois. Ils veulent de l’argent, du pouvoir, et ils veulent contrôler le clan.»

Selon les règles de cette secte, les hommes doivent avoir au minimum trois femmes pour pouvoir atteindre le paradis. Pour leur part, les femmes doivent mener une vie rangée, obéir à leur mari et élever les enfants pour gagner leur ciel.

Vus comme des menaces à l’hégémonie des leaders, les adolescents et les jeunes hommes sont souvent expulsés du camp quand ils atteignent l’âge de se marier.

Depuis le début du raid, il y a deux semaines, cinq adolescentes enceintes vivant au ranch ont été identifiées. Les autorités refusent de laisser femmes et enfants retourner au ranch en raison du risque que d’autres adolescentes soient forcées d’avoir des relations sexuelles avec les leaders du clan.

{{Lien avec la Colombie-Britannique}}

Une branche de la secte polygame texane est établie depuis des années au Canada, à Bountiful, en Colombie-Britannique. Plus de 1000 personnes y vivraient actuellement dans les bâtiments de cette secte isolée.

Le raid survenu au Texas place les autorités canadiennes devant un dilemme: intervenir pour évacuer les enfants de la secte, ou attendre qu’un des membres porte plainte à la police, comme c’est arrivé au Texas.

Hier, le procureur général de la province, Wally Oppal, a confié à La Presse Canadienne qu’il prendrait une décision rapidement dans cette affaire.

«Vous vous rappellerez qu’au Texas, une jeune fille de 16 ans a déposé une plainte, ce qui a poussé les autorités à intervenir. Ici, nous n’avons pas eu de plainte. Si nous en avions eu une, évidemment, nous serions en position de pouvoir faire quelque chose», a-t-il dit.

Le mardi 22 avril 2008

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