Il a pris les rênes de la Miviludes en août 2012. Depuis, Serge Blisko ne cesse de faire le tour de France. Ou plutôt des préfectures françaises où il alerte les services concernés de la menace sectaire en France. Son rapport, qui doit être remis jeudi à Jean-Marc Ayrault, n’élude rien de la situation. Pour 20 Minutes, il dévoile les contours de la situation actuelle.

La menace sectaire est-elle grandissante en France?
L’an dernier, nous avons reçu plus de 2.600 signalements à la Miviludes, dont 72% qui nous parviennent par Internet. C’est une augmentation de l’ordre de 10 à 15% environ. Donc, oui, nous pouvons dire que la menace sectaire grandit en France. Elle évolue aussi comme nous l’avions déjà observé ces dernières années…

C’est-à-dire?
La menace est beaucoup plus diffuse, donc plus grave à mon sens. Les pratiques non conventionnelles, notamment dans le domaine de la santé, augmentent. Le Sénat a d’ailleurs consacré un rapport à ce sujet en particulier. Les choses sont assez simples en fait. Auparavant, quand quelqu’un poussait la porte de l’Eglise de Scientologie, on le repérait très rapidement. Et on pouvait donc agir en conséquence. Mais aujourd’hui, quand quelqu’un rencontre un pseudo psychologue spécialiste de telle médecine parallèle, il nous est très compliqué de le voir.

Comment faites-vous avec ce genre de cas?
Bien souvent, ce sont les proches de la victime qui nous alertent. Des enfants qui craignent pour leurs parents. Ou l’inverse. A ce moment-là, on prend connaissance de tous les éléments. Le problème est que de nombreux petits groupes se sont formés et ils diffusent notamment leurs idées via Internet.

Que faites-vous pour les sortants de sectes?
C’est un sujet délicat. Souvent, les personnes qui parviennent à rompre avec les mouvements sectaires éprouvent une forme de honte. Il leur est compliqué de trouver de la stabilité, de retrouver un travail, de reprendre des études ou juste de reprendre contact avec la famille. Nous avons eu le cas récemment d’une dame qui est restée embrigadée plus de trente ans. A sa sortie, elle avait une cinquantaine d’années. Et elle n’avait rien du tout. Nous travaillons en ce moment à l’idée de mettre en place des abris temporaires pour prendre en charge les sortants de sectes. De manière à ce qu’ils puissent reprendre pied et surtout éviter d’être soumis à la pression des gourous.

Vous allez remettre votre rapport jeudi à Jean-Marc Ayrault. Qu’allez-vous lui demander?
D’abord, je voudrais lui demander plus de moyens pour les associations de victimes. Et puis, je pense qu’il faut accélérer la formation, notamment dans les écoles de police et de gendarmerie, ce que nous faisons déjà.

—Propos recueillis par Vincent Vantighem
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