Les médecines naturelles sont de plus en plus polluées par des gourous qui s’improvisent thérapeutes et provoquent des dégâts irrémédiables sur la santé de patients en détresse. Un phénomène qui a poussé à la création d’une commission sénatoriale sur l’influence de ces mouvements sectaires. Celle-ci devrait rendre ses conclusions au mois de janvier. Auditionné il y a quelques jours par les sénateurs, Serge Blisko, le président de la Miviludes, organisme chargé d’observer et d’alerter les pouvoirs publics sur les dérives sectaires, nous livre sa vision de ce nouveau marché très lucratif et dangereux.

Vous dites assister à l’apparition de multiples petites structures à caractère sectaire. Est-ce la fin des grandes sectes mondiales ?

Oui, le paysage sectaire s’est transformé, on voit de moins en moins de mouvements de propagande dans la rue, comme Hare Krishna fût un temps. Et quand le leader de la secte Moon est mort, on a appris que le nombre d’adeptes était en chute libre. Aujourd’hui, les gens vont moins vers le religieux, ils se tournent vers le bien-être et la santé.

Qui sont ces « nouveaux gourous » de la santé ?

Je les appelle des “dérapeutes”. Ils se font passer pour des thérapeutes pour soutirer de l’argent à des gens malades. Ils surfent sur la vague de la médecine naturelle et proposent des méthodes parfois désastreuses. Ils se donnent le nom de spécialistes en médecine quantique, de biomagnétiseurs, d’énergéticien, etc. Et pour justifier l’inefficacité de leurs traitements, ils culpabilisent le patient en lui disant que c’est de sa faute car il émet de mauvaises ondes, car ses proches sont sceptiques… C’est inadmissible.

Comment tracer une frontière entre médecine naturelle et charlatanisme ?

Il y a des choses très prometteuses dans certaines médecines naturelles, mais des indices permettent d’identifier les dérapages. Il va s’agir par exemple d’une méthode permettant de soigner aussi bien un cancer qu’un cor des pieds, ou d’une médecine qui affirme avoir un taux de guérison proche de 100%, ou encore d’honoraires exorbitants. La médecine conventionnelle peut parfois être déshumanisée, très technique, et les charlatans glissent dans cette faille avec leurs méthodes doucereuses. “N’arrêtez jamais un traitement prescrit par un médecin”

Pourquoi cet engouement des Français pour ces remèdes miracles ?

Dans nos sociétés, la maladie est de moins en moins acceptée. On souhaite que le problème de santé arrive le plus tard possible, on devient très exigeants vis-à-vis de la médecine, on se résigne beaucoup moins qu’avant face à la maladie. Du coup, on se tourne de plus en plus vers ceux qui s’empressent de nous proposer des solutions miracles.

Beaucoup de gens opèrent une reconversion professionnelle à mi-carrière pour travailler dans le bien-être. Qu’en pensez-vous ?

Il est difficile aujourd’hui de travailler dans le milieu de la santé sans diplôme reconnu. Le Conseil de l’Ordre veille à cela. Du coup, les gens se tournent vers le bien-être, domaine plus accessible. “Venez dans ma maison à la campagne, il y aura de l’odeur de santal, de la musique relaxante, ma femme vous fera un massage, et ce week-end de remise en forme vous coûtera 400 euros”. Je caricature, mais on voit beaucoup de choses comme ça. Les centres de bien-être ne sont ni des hôtels, ni des centres de cure thermale, ils échappent à tout contrôle. Et beaucoup de ceux qui veulent se reconvertir dans ce domaine se font avoir par des formations “bidons”.

Quels conseils donneriez-vous pour éviter ces structures ?

N’arrêtez jamais un traitement prescrit par un médecin classique. Si vous souhaitez une cure plus naturelle pour alléger les effets secondaires et vous porter mieux, parlez-en à votre médecin traitant et convainquez le de votre besoin, pour qu’il vous conseille autrement que par un simple ricanement. Et aux médecins, je recommanderai la plus grande vigilance. Ce n’est pas un phénomène à prendre à la légère.

source : http://www.bfmtv.com/societe/sectes-danger-nouveaux-gourous-sante-368618.html

BFMTV.COM / Propos recueillis par Alexandra Gonzalez

Le 27/10/2012