Hécate, sorcière luciférienne à Paris

«Je me suis consacrée à l’art délicat de faire dévier le cours du destin»

Cheveux noirs et regard ­profond, Hécate, sorcière luciférienne, exerce à Paris depuis plus de trente-cinq ans et reçoit une importante clientèle issue de tous les milieux: hommes d’affaires, amoureux éconduits, personnes en quête de vengeance ou de faveur. Parfois, des personnalités politiques étrangères font appel à ses compétences. Pour le meilleur et pour le pire. Dans son bureau qui ressemble à un cabinet de curiosité, elle reconnaît en souriant que la plupart des objets qui s’y trouvent sont surtout là pour planter le décor… Et que l’essentiel est ailleurs. «Née dans une famille plutôt croyante et conventionnelle, j’ai fini par prendre conscience que l’existence pouvait être autre chose qu’une vallée de larmes sans espoir et qu’il était possible de peser sur l’ordre des choses, explique-t-elle. Après une longue initiation avec Octave Sieber, grand prêtre luciférien, et Yul Rugga, grand maître français de la Wicca occidentale (un mouvement religieux syncrétiste né dans la première moitié du XXe siècle, ndlr), je me suis consacrée à l’art délicat de faire dévier le cours du destin.» Sorcière sans complexe, Hécate exécute des rituels d’amour ou de haine, de richesse ou de faillite, de puissance ou de déchéance, comme de vie et de mort. «On peut presque tout me demander, assure-t-elle. Mais c’est moi qui, en dernier ­ressort, décide si l’action est en accord avec ma vision des mondes.» Attention, la sorcière ne promet jamais rien et prévient sans détour: «On ne peut pas faire n’importe quoi ni vendre l’impossible au nom des puissances de l’occulte. L’art du sorcier agit par suggestion et modification des courants d’ondes qui nous entourent et dont nous sommes les jouets. Tout bon pratiquant des “arts magiques” crée son propre “égrégore” par la multiplication de ses rituels. Mais il ne peut jamais prétendre le maîtriser complètement. Le sorcier est l’intermédiaire entre les “forces de l’occulte” qu’il invoque et l’action à réaliser.» Hécate ne garantit jamais de résultat et refuse systématiquement d’intervenir sur la santé ou la maladie. «Sorcière oui, charlatan non!»

Hélène Jimenez, rebouteuse à La Tour-Blanche en Périgord

«Mon don, je l’ai appris par hasard. Personne n’en avait dans la famille»

Hélène a 17 ans lorsque, blessée au genou, elle se résout à aller voir un rebouteux près de chez elle. Il lui remet les nerfs en place et lui déclare qu’elle aussi a le don. Incrédule, elle s’exerce, d’abord sur elle-même, puis sur ses proches. «J’ai appris intuitivement, sans livre. Il faut toucher la zone endolorie et si le nerf se dérobe sous les doigts, c’est qu’il faut le remettre en place, dans la bonne ligne.» Hélène s’est fait connaître dans le pays par le bouche à oreille. Agée aujourd’hui de 44 ans et employée de ménage en journée, elle reçoit le soir une à deux personnes chez elle pour soigner entorses, chevilles tordues, épaules congestionnées ou sciatiques. Elle enlève aussi le feu des brûlures, en posant les mains au-dessus sans toucher la peau. En échange, les gens donnent ce qu’ils veulent: «Je ne fais pas ça pour l’argent. J’ai souffert au départ et je sais ce que c’est. Si les gens reviennent, c’est que je leur fais du bien.»

Isabelle Bevelot, guérisseuse-magnétiseuse en Champagne

«On réceptionne l’énergie négative des ­personnes, il faut savoir la canaliser»

Dans la famille Bevelot à Vitry-en-Perthois (Marne), il y a le père, Pierre, 80 ans, fils de sourcier et ancien éleveur laitier, devenu ­guérisseur ou «toucheur». Vient ensuite la fille, ­Isabelle, 45 ans. À 11 ans, elle apprend les gestes auprès de son père. «J’ai commencé à l’école, les professeurs de sport m’appelaient en plein cours pour remettre les entorses et les foulures, lorsque les élèves s’étaient fait mal.» Dès l’âge de 19 ans, elle en fait son métier et consulte dans la maison familiale. Isabelle dénoue et remet en place les nerfs coincés, éteint le feu des ­zonas ou des brûlures, apaise les ­allergies. Elle soigne aussi à distance, à l’aide d’une photographie du ­souffrant. ­Depuis deux ans, les fumeurs viennent aussi la voir. «On réceptionne l’énergie négative des ­personnes, il faut savoir la canaliser. Dès que je touche une ­personne, je reçois ce qu’elle ressent. Après chaque consultation, je me ­repose pendant quinze­ ­minutes pour évacuer les mauvaises ondes.» Isabelle a transmis le don à ses deux enfants ; son fils excelle dans la coupure du feu. Par deux fois, l’enfant à peine âgé de 10 ans a «éteint» les brûlures de son père, sur le visage et les genoux.

Adrienne Larrieu, rebouteuse magnétiseuse en Languedoc

«Mon magnétisme me guide là où est le mal, à la source»

À 89 ans, Adrienne Larrieu fait preuve d’une énergie qui coule à plein bord. Pas le genre à s’apitoyer sur son sort. Avec une voix enjouée, elle vous interroge, puis vous assoit sur l’une des chaises de sa salle à manger. C’est dans cette modeste pièce, au rez-de-chaussée d’une HLM, que ­défilent tous les matins, de 9 heures à midi, les corps fragilisés, dégingandés, meurtris… Des ­médecins lui envoient régulièrement des patients, le service des grands brûlés de Purpan a déjà eu ­recours à ses services. La retraitée de Castanet est une figure de la région. Elle a hérité du don de sa grand-mère pour soigner les brûlures (y compris par téléphone), les tendinites, les ­zonas, les eczémas… Silhouette à la Piaf, poigne de catcheuse, elle vous manipule avec une bienveillance ­musclée. L’ancienne ouvrière n’a pas ­potassé l’atlas du corps humain ­Sobotta, mais connaît sur le bout des doigts l’anatomie. Tout en ­parlant, ses mains décontractent, localisent la ­douleur, suivent les muscles, ­pressent… «Mon magnétisme me guide là où est le mal, à la source, dit-elle. Pour soigner une ­sciatique, on doit toujours partir de la malléole. Je ne suis qu’une intermédiaire avec là-haut: ça ne marche que ­lorsque c’est fait avec amour. Il faut une grande foi pour réussir!» Comme à la messe, une panière en osier recueille les cinq euros tarifés pour la consultation. Mais chaque matin, à l’aube, c’est ­gratuitement qu’Adrienne fait le tour de ses voisins pour les soulager de leurs maux. «Penser aux autres? Tout le monde à ce don, non?»

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