La grande salle était pleine dès 19 h 45 pour la projection du film « Martha Marcy May Marlene », ou l’histoire d’une jeune femme qui a quitté une secte et cherche à se reconstruire. Le film détaille d’une façon presque clinique comment un être humain accepte de se soumettre et se débarrasse peu à peu de son libre arbitre.

En France, c’est l’affaire des « reclus de Monflanquin » qui avait sensibilisé l’opinion publique : Thierry Tilly avait ruiné une famille d’aristocrates du Sud-Ouest en lui faisant croire qu’elle était visée par un complot. Parmi eux, Charles-Henri et Christine de Védrines. Ils étaient présents lundi soir, après la publication du témoignage de la mère de famille dans un livre (1), pour que les spectateurs comprennent bien comment cette famille sans problèmes particuliers a pu basculer dans ce que fut leur vie sous emprise durant dix ans.

Daniel Picotin, leur avocat et ancien député de la Haute Gironde, qui a fait condamner le gourou en appel (2), a donné plusieurs exemples de l’idée fausse selon laquelle les gourous ne s’attaquent qu’à des gens simples, peu cultivés. « La manipulation consiste dans un premier temps par une bonne connaissance des gens, de l’empathie, pour ensuite trouver leurs failles et enfin avoir l’emprise sur eux grâce à plusieurs types d’action comme le fait de les isoler, de les priver de nourriture… » a expliqué le couple de Védrine.

Un débat riche

Des questions précises ont été posées et le public a, de son aveu même, beaucoup appris dans les réponses. La raison en est sans doute la sincérité dans le dialogue et la sobriété dans l’évocation des faits qui n’a jamais tourné au pathos. Les spectateurs ont ainsi pu noter les « signes qui doivent interpeller lorsqu’un proche change d’attitude », et ont appris que la manipulation compte plusieurs étapes allant de l’isolement à la paranoïa de groupe en passant par la privation de nourriture et de sommeil ».

Tout est bien étudié par les gourous qui se servent par exemple de la psychanalyse (en utilisant le transfert pour laisser le sujet manipulé dans la régression). « Mais heureusement, grâce à ce dialogue avec les de Védrines, nous espérons que vous avez des clés pour vous rendre compte comment on peut conserver son intelligence tandis que toute pensée rationnelle est annihilée. Quant à moi, j’espère continuer à agir pour donner la clé qui ouvre la serrure de la prison mentale », a conclu Daniel Picotin.

(1) « Nous n’étions pas armés, les reclus de Montflanquin », chez Plon. (2) Daniel Picotin est aussi président d’Infos sectes Aquitaine, 5 rue Dufau, à Bordeaux. Tél. 05 56 44 25 58.

source : par Michèle Méreau
http://www.sudouest.fr/2014/05/02/sortir-d-une-prison-mentale-1541119-3227.php