«J’en ai des frissons rien que d’y penser, lance d’abord Céline Pigeon, qui demeurait sur la même rue que Chantal Lavigne. C’est vraiment troublant.»

Vendredi après-midi, la femme de 35 ans a succombé à ses blessures, après avoir subi un traitement à la boue dans un centre énergétique situé près de Durham-Sud, dans le Centre-du-Québec.

La victime aurait été couverte de boue et enveloppée dans une pellicule de plastique pendant plusieurs heures.

Son décès a été constaté à l’hôpital de Drummondville. Deux autres femmes ont eu un malaise à la suite de la même thérapie, mais leur vie n’est pas en danger.

«Des gens marginaux»

Chantal Lavigne laisse dans le deuil un conjoint, Patrick Naud, et deux jeunes enfants, âgés de 2 ans et 6 ans.

Hier, des voisins de la famille avaient du mal à croire ce qu’il s’est produit.

«Je ne comprends pas, répète Ève Blanchet, en hochant la tête. Elle avait son style de vie et aimait suivre des traitements naturels. Mais, pas de façon extrême.»

Cette dernière ne croit d’ailleurs pas à la thèse d’une secte.

«Elle était très intelligente, je ne pense pas que ça se peut.»

Un peu plus loin, Cathy Desharnais était visiblement sous le choc lorsque le Journal lui a appris la mort de sa voisine.

«C’étaient des gens marginaux, mais en quelque part, nous sommes tous différents, dit-elle. C’est vraiment dommage, c’était une très bonne personne.»

Enquête en cours

La Sûreté du Québec (SQ) a ouvert une enquête, vendredi, afin de déterminer si des éléments suspects, criminels ou encore de la négligence sont en cause.

Hier, Patrick Naud n’a pas rappelé le Journal.

Un cas exceptionnel

Le drame survenu à Durham-Sud est «exceptionnel» et ne doit pas remettre en question la pratique des médecines alternatives, défendent les thérapeutes.

«Ce qui est arrivé est un cas exceptionnel. Le traitement à la boue n’est pas dangereux pour la santé lorsqu’il est bien exécuté», assure le président de l’Association canadienne des thérapeutes en médecines douces, Jocelyn Vincent.

Ce dernier espère d’ailleurs que ce drame n’entachera pas la réputation de tous les professionnels.

«Ce n’est pas parce qu’une personne ne fait pas les choses dans les règles de l’art qu’on doit tout jeter dans les vidanges.»

Négligence?

Voisine de la victime, Cathy Desharnais offre des soins à base de boue dans le centre de santé où elle travaille. Selon elle, il est inconcevable que le traitement de Chantal Lavigne ait duré plusieurs heures.

«C’est certain qu’il y a eu de la négligence. C’est très connu qu’il ne faut pas dépasser 25 minutes.»

Daïva Goulet, la femme qui offrait les traitements au centre énergétique de Durham-Sud, a refusé d’accorder une entrevue au Journal. Vendredi, elle déclarait toutefois «qu’il n’y a pas eu de négligence.»

Responsabilité du client

Jocelyn Vincent croit par ailleurs que les patients ont une responsabilité lorsqu’ils font affaire avec un thérapeute.

«Il y aura toujours des gens qui vont tirer profit de la naïveté des autres, dit-il. C’est le travail du client de s’assurer que la personne est compétente.»

Actuellement, aucune loi ne réglemente le titre de thérapeute au Québec. Selon Jocelyn Vincent, environ 80 % des 10 000 thérapeutes de la province font par tie d’une association reconnue.

* * *

Autre thérapie mortelle

Trois personnes sont mortes et une vingtaine d’autres ont été blessées lors d’une thérapie de sudation extrême, en Arizona, en 2009. Les participants étaient entassés dans un dôme où la chaleur, générée par le brûlement de pierres, était suffocante. Il s’agissait d’une cérémonie basée sur une tradition amérindienne.

SOURCE : NEW YORK TIMES par Héloïse Archambault le 31/07/2011