Trois moines bouddhistes vêtus du Kesa rouge-brun, natifs du Bhoutan (aux confins de l’Inde et de la Chine), ont comparu avec une interprète sino-tibétaine, lundi au tribunal de Chalon, pour y répondre de la prévention d’abus de faiblesse sur une personne vulnérable. Les faits auraient été commis entre 2006 et 2007 au temple des Mille Bouddhas situé à La Boulaye. La plaignante, une femme dépressive depuis 2004, avait perdu son emploi. Une rupture sentimentale et la disparition brutale de son enfant l’avaient entraînée dans un état de dépersonnalisation et d’errance.

Dans sa recherche intérieure, elle va tenter de trouver un refuge, une nouvelle famille dans la religion bouddhiste. Elle tombera amoureuse d’un lama cité dans cette affaire. Elle vendra sa maison, pour faire un don total de 50 000 euros au profit de cette congrégation religieuse, et puis elle rédige 2 chèques de 1 000 euros aux deux autres moines à titre de don et pour des prières.

Le président du tribunal, Mathieu Husson, a cherché à savoir pourquoi Chopel S., 52 ans, directeur à l’époque du temple des Mille Bouddhas a accepté un chèque de 40 000 euros en décembre 2006 puis de 10 000 euros en avril 2007. Le prévenu placide, prétend que le don et la générosité font partie de la religion bouddhiste. Il se défend d’avoir connu l’état de faiblesse de la généreuse donatrice.

Karma L., 34 ans, abonde dans ce sens, il explique que dans la terre du dragon, son pays, la folie par exemple existe mais de manière apparente, il n’a pu comprendre et appréhender la situation de vulnérabilité de la victime.

Dorji L., le vénérable âgé de 71 ans, impassible affirme ne pas s’être posé de questions.

« Des dons pour être acceptée »

M e Faure pour la partie civile estime que sa cliente ayant fait un séjour de deux mois au temple était dans un état de grande faiblesse. « Pour être acceptée, il faut faire des dons. La perfection des dons, elle a tout donné. Elle est ruinée », lance-t-il.

Le ministère public en préambule a relaté que les trois lamas cités étaient les fondateurs du temple. Ils ont été exclus de cet ordre religieux pour fautes graves. Cependant, « dire qu’on n’est pas psychologue, ni psychiatre, ou on n’a pas l’habitude de ces personnes-là, c’est facile », avance la substitut du procureur. Elle concède qu’il s’agit d’un dossier difficile d’abus de faiblesse et exprime ses doutes ses incertitudes : « À quel moment se sont-ils rendu compte qu’elle était fragile ? » Mais elle insiste sur un point : « Dire je n’ai pas cherché à savoir l’origine des fonds, c’est facile ! » Elle réclame à titre principal des peines d’amende à hauteur du préjudice subit par la victime.

L’avocate parisienne entame sa plaidoirie en expliquant que « le délit ne fonctionne pas en l’espèce ». Puis, dans un exposé tonique et vibrant, elle tente de démontrer que la plaignante affichait un comportement normal notamment au temple. Les moines bouddhistes ne pouvaient se rendre compte de sa vulnérabilité, ni connue, ni apparente. L’avocate conclut en demandant la relaxe : « Ils se sont fait chasser du temple. Où est l’abus ? »

Le tribunal en toute sagesse s’est donné le temps de la réflexion : le délibéré sera prononcé le 20 juin 2011.

Source : source :Le Journal de Saône-et-Loire du 18/05/2011