M.A. France-Antilles Guadeloupe 01.04.2009

A Jarry, les locaux de l’association sont situés dans une impasse discrète. Les rares résidents de cette ruelle avaient remarqué la fermeture de la chapelle et s’en demandaient la raison.
Mis en examen pour abus de confiance et abus de faiblesse, un pasteur évangélique a été placé en détention provisoire.
Les fidèles avaient l’air vraiment perdu en découvrant l’église fermée. Ils sont restés de la fin de matinée jusqu’à 17 heures, au moins, là-bas, sous le manguier. » A Jarry, la chapelle de l’Association du ministère de l’évangile est située dans une impasse discrète, où demeurent trois ou quatre familles. Depuis trois jours, les locaux de l’association sont fermés. Sur la porte du hangar qui tient lieu de chapelle, un simple mot placardé : « Frères et soeur, la réunion de ce soir est exceptionnellement annulée. Soyez bénis » .
L’exception risque de s’éterniser. Les « frères et soeurs » savent désormais, bouche à oreille aidant, que leur pasteur – un homme de 35 ans, originaire de Côte d’Ivoire, mais de nationalité française – dort en prison. Interpellé en fin de semaine, avec huit autres personnes, dont sa femme, il a été mis en examen pour abus de confiance et abus de faiblesse, et placé en détention provisoire. Les autres coprévenus sont sous contrôle judiciaire.

{{Un studio de télévision}}

L’histoire n’a rien de très original. Comme dans nombre d’églises, le pasteur demandait à ses fidèles une participation financière. Plutôt élevée, d’ailleurs, jusqu’à parfois 10% des revenus, selon certains témoignages. Mais il semble bien qu’au lieu de l’utiliser au bénéfice de son église, il s’en soit servi pour des dépenses somptuaires, biens immobiliers et mobiliers, voyages… « Sa femme et lui menaient grand train » , confie-t-on à la Direction de la police judiciaire (DIPJ). Il faut dire qu’avec deux églises en Guadeloupe, deux en Martinique et une en Guyane – ainsi qu’une demi-douzaine en Europe – le berger ne manquait pas de brebis… Le préjudice déjà établi est estimé à 800 000 euros, et l’enquête, à ce niveau, n’est pas close. Le pasteur s’était également offert des moyens modernes pour attirer de nouveaux adeptes – un studio de télévision, un site internet – et mettait en oeuvre, semble-t-il, de ces pratiques psychologiques d’endoctrinement qui sont en vogue dans nombre de sectes.

La DIPJ, en collaboration avec le Groupe d’intervention régional (Gir), a mis un terme à tout cela, lors d’une vaste opération organisée de façon concomitante sur les trois départements. Ainsi s’est clôturée une enquête de trois mois, décidée à la suite d’une seule plainte. Celle d’une dame persuadée que sa fille avait été spoliée. La victime est morte, mais sa maman a poursuivi le combat jusqu’à son terme…