Article 19 de la convention internationale des droits de l’enfant. (ONU 20.11.1989) ratifiée par la France :

– » Les Etats partie prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l’enfant contre toutes les formes de violence, d’atteintes ou de brutalité physiques ou mentales, d’abandon, ou de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation, y compris la violence sexuelle, pendant qu’il est sous la garde de ses parents ou de l’un d’eux, de son ou ses représentants légaux ou de toute autre personne à qui il est confié. »

Sur son site destiné aux enfants ce paragraphe a été traduit par le Défenseur des Droits par ce court texte explicite :
« – L’Etat doit te protéger contre TOUTES les formes de violence et de brutalités physiques et mentales. »

La loi dit aussi que, pour un même acte délictueux ou criminel, un mineur doit être moins lourdement puni qu’un majeur.

Je vous donne maintenant ci-après le témoignage d’un enseignant (Bernard DEFRANCE) qui compare la loi à l’usage lors d’une interview .

« L’apprentissage de la loi suppose sa mise en pratique .

– Que se passe-t-il DANS LES FAITS, quand je perds mon sang-froid et que je flanque une claque à un élève (ça n’arrive jamais, bien sûr… : – le bon maître saura, par une autorité juste mais ferme, etc… etc…, vous connaissez le discours).

{{Qu’arrive t-il dans ce cas ?
}}

Eh bien, une fois sur dix les parents qui surprotègent le précieux chéri vont protester et, éventuellement, ME TRAÏNER EN JUSTICE.
En Justice, neuf fois sur dix ILS SERONT DEBOUTES..

Une fois sur dix ils viennent me trouver en me demandant de TAPER PLUS FORT parce qu’eux-mêmes ne savent plus quoi faire de leur voyou.

Huit fois sur dix, IL NE SE PASSE RIEN.

{{- Que se passe-t-il, en revanche, DANS LES FAITS, si un élève, perdant lui aussi son sang-froid, me frappe ?
}}

Eh bien, dans l’heure qui suit :
grève des collègues, titres dans les journaux, les sociologues de la « violence à l’école » s’abattent sur les plateaux de télévision, signalement au parquet des mineurs, déclarations ministérielles, délégations,

. et, bien sûr, pour le gamin, conseil de discipline et expulsion. »

Ainsi, pour la sanction de cette infraction, l’école fonctionne à l’envers de la loi, le mineur est beaucoup plus fortement sanctionné que le majeur. »
« Ne vous étonnez pas des résultats » ajoute Bernard DEFRANCE.

{{L’enfant a, en effet, une forte conscience de l’injustice.}}

Quant à l’APPLICATION de l’article 19, il n’en est pas question à l’école (ailleurs non plus).

En février 1922 l’historien Gustave DUPONT écrivait :
« La discipline de la maison (l’école) ne triomphait que par la force et n’agissait pas sur les consciences »

Cinquante ans plus tard historiens et philosophes dénonceront encore le caractère contraignant et coercitif du fonctionnement des établissements scolaires : silence dans les classes, élèves en rang dans la cour, dialogue inexistant avec les adultes, toute puissance des enseignants, travail ramené à la restitution passive des matières apprises.

En 1968 on dénonçait le lycée caserne ainsi que les punitions corporelles.
Quarante ans après, quels changements ? Malgré l’existence de délégués, pas grand-chose. Le collège et le lycée caserne sont maintenant entourés de hauts grillages assortis d’un gardien bardé de clés. La caserne dénoncée en 68 évolue vers la prison et les élèves font irrésistiblement penser aux détenus. Ils sont enfermé (par trente du même âge) dans un lieu clos dont ils ne peuvent sortir qu’après en avoir obtenu l’autorisation, concentrés à heures fixes dans une cour bétonnée, ils doivent obéir au coup de sifflet, avoir toujours tort face à l’adulte, être jugés, etc…

Quant à l’école maternelle/primaire ses rythmes et ses exigences sont en parfaite contradiction avec les besoins des jeunes enfants .

Besoins :

Ne jamais être réveillé,

s’endormir et se réveiller près des parents,

se savoir aimé sans conditions,

pouvoir aimer sans démenti de la part de ceux qu’il aime,

se savoir protégé nuit et jour,

être entendu au moment précis où il appelle à l’aide,

évoluer dans un milieu stable,

pouvoir expérimenter librement,

vivre hors des pressions, du bruit, de l’agitation, des ruptures de toutes sortes,

etc..

{{ De la mauvaise foi à la trahison effective des enfants.
}}

L’Etat est maltraitant, à travers l’école notamment . Les conséquences de la scolarisation sur la santé des enfants n’est jamais évaluée. De plus, la connaissance des besoins des enfants n’a jamais été une préoccupation pour l’Education nationale (en dehors d’une surveillance sommaire de la santé physique).

Des conditions pathogènes sont infligées aux enfants. Personne ne cherche à les mettre en évidence, l’école « de la République » ne doit pas être soupçonnée.

Le gouvernement et les enseignants ont pour mission de défendre les institutions et pas du tout celle de les changer. Les parent, quant à eux, pensent qu’ils n’ont pas le choix.

{{Réflexion d’une institutrice de petite section de maternelle :}}

« Non, ça ne m’inquiète pas. C’est comme ça. Ils viennent de la crèche ou d’un autre mode de garde, après ils iront à la grande école. Oui, c’est fatigant pour eux et pour moi, mais ils savent très bien quand ils doivent s’arrêter, ils deviennent malades, comme ça ils se reposent. C’est comme ça et personne ne veut que ça change, les femmes ne retourneront pas à la maison. »

{{ Réflexion d’un parent :}}

« Il y en a qui pleurent pendant quinze jours ou plus.
Ils finissent par s’y faire. » Et en effet, ils « s’y font » !

L’opinion générale qui imprègne notre culture c’est que les enfants sont naturellement destinés à devenir des voyous fauteurs de désordre. Dans cette optique, la bienveillance et les égards n’auraient d’autres effets que les encourager dans leurs mauvais penchants et seule la coercition serait en mesure d’en venir à bout.

Cette terrible erreur est quasi officielle. Elle est bien représentée par notre Président de la République actuel Nicolas SARKOZY chantre de la répression et ennemi juré de la prévention.

Ainsi les particuliers, comme l’Etat, consciemment mais aussi inconsciemment, agissent à l’inverse de la loi en trouvant légitime de réserver les mauvais traitements aux enfants alors qu’ils ont, avec les adultes, des échanges empreints de respect et d’urbanité.

L’indifférence des adultes à l’égard des mauvaises conditions infligées aux enfants est à première vue incompréhensible, car en effet, aucune espèce vivante autre que l’espèce humaine ne malmène ou maltraite ses petits. Sachant que la sollicitude à l’égard de ses petits est forcément innées (pour permettre la perpétuation de l’espèce), on ne peut que se demander comment il se fait que l’homme fasse exception ?

Notre capacité à protéger nos enfants jusqu’à leur âge adulte ne peut avoir été altérée, amoindrie, que par des événements culturels et non naturels.

Peut-être faudrait-il aussi interroger les phénomènes épigénétiques pour expliquer certaines dérives, mais la science ne semble pas encore en mesure de donner des réponses certaines.

La recherche a devant elle un champ immense a explorer. Espérons que les neurosciences et les sciences sociales sauront collaborer à hauteur de l’enjeu.

Les enfants humiliés, bafoués, ignorés, niés sont souvent désemparés, sujets à des tumultes inconscients lorsqu’ils deviennent parents. Certains endossent le statut de leur parent maltraitant et identifient leur enfant avec l’enfant déclaré mauvais qu’ils étaient. Ils se débarrassent en quelque sorte de leur fardeau en le transmettant à leur enfant.
{{
J’ai été le témoin de l’un de ces cas. L’issue avait été tragique.}}

Avec des conséquences moins dramatiques beaucoup de parents usent de reproches, de critiques, de harcèlement sur leur enfant pour exercer enfin une domination qu’ils ressentent comme salvatrice.

Le stress intense et continu subi par les jeunes enfants pendant la période cruciale où l’essentiel de leur système nerveux se forme (entre la date de la conception et l’âge de six/sept ans) influe largement sur la construction du cerveau laquelle construction est, on le sait, conditionnée par les informations qui lui sont fournies par l’environnement.

Dans les conditions de maternage et d’élevage telles qu’elles existent quasi universellement aujourd’hui, cet environnement est ressenti et enregistré dans l’inconscient dès le berceau comme hostile, dangereux, non secourable. Ces sentiments négatifs se manifesteront plus tard de façon d’autant plus incontrôlable qu’elles auront été acquises pendant la période pré-verbale. Reçus hors langage, ces ressentis ne pourront plus être reconstruits plus tard par une pensée portée par les mots.

Ces événements font que, dans ces conditions, l’empathie est dans l’impossibilité de se développer, que l’estime de soi est amoindrie, voire détruite, que la confiance dans les autres ne peut pas naître, que se développe ainsi dès la petite enfance une culture de l’antagonisme, l’Autre étant perçu définitivement comme un risque, un danger, et même un ennemi.

{{A propos de notre culture anti-enfants.}}

On peut accuser la tradition. Il y a une continuité depuis le 19 ème siècle, et depuis l’époque où la cardinal de Bérulle déclarait que l’enfance était la période de la vie la plus vile et la plus abjecte. La tradition, parisienne surtout, de la mise en nourrice des nouveaux-nés dans des conditions souvent abominables au 18ème et 19ème siècle est bien connue.

Monsieur Nicolas SARKOZY notre Président de la République est un digne successeur du cardinal de Bérulle, notamment lorsque, ministre de l’intérieur, il établissait en 2003 un projet de loi à l’encontre des délinquants juvéniles. Il énonçait à cette occasion, « qu’il ne faut pas donner une excuse sociale ou sociologique à la délinquance », et aussi, « qu’il faut rompre avec une approche de type social, renoncer à étudier les causes de la délinquance ».

{{En clair : continuons à fabriquer des délinquants, il suffit de les éliminer au fur et à mesure lorsqu’ils se manifestent.
}}

Ces vision traditionnelle réductrice et non respectueuse de l’enfance sont assez largement partagée par le public d’ailleurs, réactivées par les grandes idéologies de la deuxième moitié du 20 ème siècle qui visaient toutes à libérer l’individu face à la société et face aux servitudes familiales et contractuelles.

Certains auteurs n’ont pas hésité à annoncer que la nouvelle culture tant promue était une réalité acquise.

Lisons en effet Caroline ELIACHEFF :

« les femmes ne veulent plus, ne peuvent plus, sacrifier leur vie sociale à l’éducation de leurs enfants ».
Caroline ELIACHEFF exagère quelque peu, heureusement, car si elle avait entièrement raison tous les enfants seraient orphelins puisque, évidemment, des parents qui ne veulent pas et ne peuvent pas s’occuper de leurs enfants ne sont pas des parents.

Cependant, globalement, les enfants sont bel et bien en partie abandonnés, les pères n’ayant que très peu remplacé les mères auprès des enfants, pour plusieurs raisons (coût de la vie et surconsommation, inégalité profonde entre les parents, maintien de la tradition, pression du féminisme et de l’économie, impossibilité physique dans certaines professions etc…).

La recherche d’une solution à la situation plus ou moins gravement pathogène vécue par les enfants ne semble pas être la préoccupation principale des Français, c’est le moins que l’on puisse dire.

La vie privée est plus que jamais concurrencée par la vie professionnelle, repoussant les enfants hors de la famille dont la responsabilité est rognée de plus en plus au profit de l’école.

Des assises nationales ou un Grenelle de l’enfance réunissant des experts libres de toute appartenance/allégeance devraient être organisés. Malheureusement nos politiques n’en ont aucunement l’intention.

blog de Raymond SAMUEL sur mediapart.fr

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