Par Pierre ROCHICCIOLI

ATTENTION – ajoute réactions PS et MoDem ///

PARIS, 15 sept 2009 (AFP) – Une initiative parlementaire controversée entraînant l’impossibilité de dissoudre une secte condamnée pour escroquerie va être corrigée, a annoncé mardi Michèle Alliot-Marie, alors que des voix évoquent une possible infiltration de la Scientologie dans l’appareil d’Etat.
La Mission interministérielle de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) avait jeté un pavé dans la mare lundi en révélant qu’une modification législative, votée le 12 mai et passée inaperçue, interdisait de prononcer la dissolution de personnes morales condamnées pour escroquerie.
Or, le parquet de Paris avait requis le 15 juin la dissolution des principales structures françaises de la Scientologie dans un dossier d’escroquerie. Le tribunal doit se prononcer le 27 octobre, mais la dissolution réclamée est rendue impossible par le nouveau texte.
Devant le tollé, la ministre de la justice Mme Alliot-Marie a annoncé mardi son intention de rétablir la possibilité de dissolution des sectes “à l’occasion du prochain texte pénal”.
“Il s’est glissé, dans un texte (…) une disposition pour le moins curieuse et contestable”, selon Henri de Raincourt, ministre chargé des Relations avec le Parlement.
Cette “erreur matérielle” sera “corrigée dès que possible”, a abondé Mme Alliot-Marie, relayée par le président de l’Assemblée, Bernard Accoyer, selon qui ces nouvelles dispositions pourraient être incluses dans le projet de loi pénitentiaire, examinée depuis mardi.
“A supposer que les dispositions supprimées soient rétablies, elles ne pourront s’appliquer au procès en cours”, a réagi l’Union syndicale des magistrats (USM-majoritaire), demandant au gouvernement “de faire toute la lumière sur ce qui pourrait bien être un scandale d’Etat”.
“C’est un désastre législatif, car cela supprime toute possibilité de dissoudre la Scientologie dans les autres dossiers judiciaires en cours”, souligne auprès de l’AFP Me Olivier Morice, avocat des victimes présumées de l’organisation.

Le député (app-PCF) Jean-Pierre Brard, spécialiste des sectes, a réclamé une enquête tout comme Corine Lepage (MoDem) pour qui ce “scandale” ne doit pas profiter à l’Eglise de Scientologie.
La modification contestée est intervenue dans le cadre d’une loi “de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures” votée à l’initiative du député UMP Jean-Luc Warsmann.
“Cette affaire n’est pas crédible (…) Warsman a décidé de couvrir tout cela. Moi, je veux savoir qui tenait le porte-plume”, a expliqué M. Brard
Pour lui, cette disposition avait pour but de protéger la Scientologie. Il explique “déduire de ce qui s’est passé” la preuve que l’église bénéficie “de sympathie dans l’appareil de l’Etat”.
“Quand on a vu Danièle Gounord (une porte-parole de la Scientologie, ndlr) dans les tribunes de l’Assemblée, des dossiers de la Scientologie s’évaporer au palais de justice de Paris ou Tom Cruise être reçu à Bercy par Nicolas Sarkozy, on peut se poser des questions”, a argumenté le député.

Plus direct, le député PCF Roland Muzeau soupçonne “une infiltration” de la Scientologie “à la Chancellerie”.
Dénonçant une “modification législative suspecte”, le PS s’interroge “sur les intentions réelles d’une abrogation faite ainsi en catimini”.
Pour les avocats de la Scientologie, “affirmer que cette modification législative aurait été suggérée par l’Eglise de Scientologie (…) est de nature à tenter d’influencer la décision des juges sur le principe même d’une condamnation”.