Le Comité national d’action laïque (Cnal), qui défend l’école publique et la laïcité, a publié le 9 mars 2022 une enquête inédite sur les établissements scolaires privés hors contrat.

Pour ce faire, le Cnal a réussi à obtenir, malgré les réticences de l’Education nationale, 164 rapports de visite de ces établissements sur les 1800 recensés. Un échantillon suffisamment important pour que soient dépistées des carences pédagogiques, mais aussi de graves dérives au sein des établissements catholiques souvent très conservateurs voire intégristes. Les inspecteurs ont pu constater que plusieurs éléments du socle pédagogique ne sont pas enseignés ou le sont mal : ils dénoncent un déficit dans la formation à l’esprit critique, dans l’acquisition de démarches scientifiques, et des amalgames fréquents entre histoire et religion. Par exemple, au sein de l’école Sainte-Marie, à Saint-Père-Marc-en-Poulet (Ile-et-Vilaine), affiliée à la communauté Saint-Pie-X, il est écrit dans un cahier de lycée : « Le projet de l’Encyclopédie était au fond le fruit d’une conspiration dont le but caché était l’anéantissement de toute religion et le renversement de toute autorité. » Concernant l’école traditionaliste Notre-Dame-du-Rosaire, à Saint-Macaire (Gironde), dans un rapport d’inspection en date du 15 décembre 2020, on peut lire : « Les valeurs de la République n’apparaissent pas dans les traces écrites des élèves du premier degré. Le manuel d’histoire support de cet enseignement accorde une très faible place aux personnages qui ont façonné la République. Le général De Gaulle n’est ainsi pas une figure historique à retenir dans ce manuel. » En revanche, « le maréchal Bugeaud apparaît comme le personnage grâce à qui les Arabes ont pu apprendre à développer leur agriculture en Algérie ». Pire : « Le rôle de Vichy dans l’extermination des Juifs est mis sous silence, et ce génocide n’est d’ailleurs pas mentionné dans le traitement de la Seconde Guerre mondiale. »

Dans ce type d’école, les classes sont parfois non mixtes… Un rapport montre que des responsabilités proposées aux garçons sont refusées aux filles. « Les filles ne déjeunent pas dans la même salle de restauration que les garçons, elles ne sont pas autorisées à participer aux groupes de responsabilité », peut-on lire. Sans surprise, les cours d’éducation sexuelle sont totalement absents, mais souvent aussi l’éducation physique et sportive, de même que celle aux médias et à l’information. Ces rapports ne sont probablement pas les pires, puisque le Cnal n’a pu obtenir que 10 % des rapports de l’ensemble des écoles. Les écoles Steiner (une vingtaine en France) semblent poser de graves problèmes par leur remise en cause de la science et leur aspect ésotérique. Autre manque, le Cnal n’a obtenu quasiment aucun document concernant des établissements musulmans hors contrat (au nombre de 62 en France), qui peuvent pourtant parfois s’apparenter à des écoles coraniques.

Comment remédier à des telles dérives ? Accentuer les contrôles ? Le Cnal préconise de prévenir plutôt que de guérir : « On pourra toujours durcir les contrôles, une fois qu’elle est ouverte, c’est trop tard, et les pouvoirs publics sont mis devant le fait accompli », alerte son président Rémy-Charles Sirvent. Le Cnal dénonce une trop grande facilité pour ouvrir ce type d’établissement qui doit seulement assurer que « l’objet de l’enseignement répond aux attendus du socle commun de connaissances, de compétences et de culture », sans plus de précisions. Le Cnal préconise donc une modification de la loi en la matière pour durcir les conditions d’ouverture des établissements privés hors contrat. Alexandre Ballario – Pour aller plus loin 719. Golias Hebdo n° 719 (Fichier pdf)

source : https://www.golias-editions.fr/2022/05/05/le-grand-nimporte-quoi-du-prive-hors-contrat/