Le parquet de Paris a ouvert, vendredi 13 janvier, une enquête pour homicide volontaire après la mort du journaliste de France 2 Gilles Jacquier, tué par un obus, le 11 janvier, à Homs. Son corps, rapatrié vendredi en France, a été autopsié. La direction de la chaîne a déposé plainte. Elle s’étonne des circonstances ” troublantes ” entourant l’attaque, notamment la soudaine disparition des militaires escortant les journalistes au moment de couvrir une petite manifestation pro-régime et l’insistance des organisateurs à monter cette visite à Homs, Gilles Jacquier y étant réticent. Les autorités syriennes ont annoncé la création d’une commission d’enquête sur cette “attaque terroriste “.
Reprenant à son compte l’argumentaire du régime, elle explique agir ” par amour de la vérité et pour protéger la population civile attaquée par des gangs armés “. Pour elle, le régime n’est pas parfait mais s’il tombe, la Syrie – et en particulier la communauté chrétienne – subira le même sort que l’Irak : la guerre civile et l’épuration communautaire. Son point de vue est partagé par une grande partie de la communauté et des ecclésiastiques chrétiens, avec des exceptions comme le jésuite italien Paolo Dall’Oglio du couvent de Mar Moussa, menacé d’expulsion en 2011.
UNE “CHABIHA MÉDIATIQUE”
Pour un diplomate en poste à Damas, la religieuse est une ” chabiha médiatique “, une milicienne à la solde du régime. En novembre 2011, elle organise un premier voyage pour la presse catholique, ainsi que La Libre Belgique et la télévision belge francophone, emmenée à Homs, dans les quartiers tenus par l’armée. Début janvier, alors que Damas lance une opération de communication en parallèle à la mission d’observation de la Ligue arabe, la religieuse obtient une dizaine de visas, notamment pour l’équipe de France 2, venue pour un sujet sur les pro-Assad.
Un programme de la visite des journalistes a été préalablement établi en accord avec les ministères de l’information et des affaires étrangères syriens. Dès que Gilles Jacquier exprime le souhait de s’en écarter, il est menacé d’expulsion.
Son séjour, à partir du 7 janvier, ne se passe pas bien, selon sa compagne Caroline Poiron, présente sur place : ” En théorie, nous étions libres de circuler à Damas. Mais dès qu’on voulait sortir, il manquait toujours quelque chose : un papier, un traducteur, une autorisation. Nous étions soumis en permanence à une propagande très subtile. ”
” Les journalistes étaient libres, répond la religieuse. Je n’ai rien organisé, j’ai juste fait l’intermédiaire. On rend service et, ensuite, vous vous faites poignarder dans le dos. Ce n’est pas correct. ” Une formule pour le moins mal venue.
Christophe Ayad

Source : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2012/01/14/une-religieuse-au-service-de-bachar-al-assad_1629722_3218.html