NEW YORK, 22 mai 2008 (AFP) – Plus théâtre qu’église, dépourvu de symboles sacrés, un édifice monumental situé face à Central Park réunit tous les dimanches des fidèles qui ne croient pas en Dieu.
La Société de Culture Ethique pratique une religion humaniste sans divinité, sa devise est « L’action avant la Foi » et comme d’autres groupes athées, agnostiques ou indépendants, elle gagne des adeptes aux Etats-Unis.
Selon une étude du Pew Forum, les « non affiliés » représentent seulement 16% des Américains, mais ils sont la catégorie qui croit le plus rapidement dans le paysage religieux très compétitif des Etats-Unis.
« Mes besoins spirituels, éthiques et sociaux sont satisfaits », explique à
l’AFP Judith Wallach, qui est membre de la branche new-yorkaise de cette communauté depuis des années.
La chute relative de la popularité de Dieu dans une société très croyante se reflète également au niveau éditorial, y compris au rayon des meilleures ventes.
Des ouvrages comme « Dieu n’est pas grand », de Christopher Hitchens, « La Fin de la Foi » de l’Américain Sam Harris ou « Pour en finir avec Dieu », du britannique Richard Dawkins, ont battu des records ces trois dernières années.
Certains experts attribuent le phénomène à une réaction aux fondamentalistes musulmans, juifs ou chrétiens dans le monde traumatisé et sceptique de l’après 11-Septembre.
D’autres considèrent qu’il s’agit d’un phénomène plus ample. « Toujours plus de gens se rendent compte qu’il est possible de mener une vie bonne, bien remplie et morale, sans religion », dit à l’AFP le philosophe Daniel Dennet, enseignant au Massachusetts (nord-est).
« Non seulement Dieu n’est pas en train d’exploser, comme le supposait
Nietzsche, mais il est en train de s’évaporer lentement devant nos yeux », ajoute Dennet, auteur de « La dangereuse idée de Darwin », qui proclame l’universalité de la théorie évolutionniste du naturaliste anglais.
Fondée en 1876 en pleine effervescence darwiniste par Felix Adler, un
humaniste rationaliste fils d’un rabbin immigré d’Allemagne, la Société de
Culture Ethique compte actuellement quelque 3.000 membres à New York.
Elle admet les athées et ceux qui conservent leurs croyances. Ses réunions dominicales ne sont pas des messes mais des forums qui commencent par un bref concert et se poursuivent avec des conversations, des chants et une conférence d’une demie-heure sur un thème donné. Elles se terminent par une collecte d’argent pour une oeuvre caritative.
Cette semaine, il s’agit des victimes du séisme en Chine. Dimanche prochain, la Société débattra de la guerre en Irak et du recours à la torture, qu’elle
réprouve.
« Ces offices ressemblent à des services religieux traditionnels, avec de la
musique, des échanges et un certain esthétisme, mais ils en diffèrent par leur ouverture et l’absence d’adoration d’une divinité supérieure », explique Bart Worden, président de l’Union Ethique américaine.
Jesai Jaymes a 55 ans, se consacre au théâtre et a adhéré il y a une semaine à la Société, découverte au cours d’une promenade dans Central Park. Il dit y avoir rencontré « des gens brillants ».
Il loue « une organisation qui appuie l’action sociale plus que les croyances et les oraisons. Je peux prier dans le parc, où je pratique mon yoga », dit-il. Docteur en histoire de l’art et membre depuis quelques années, Ruth Cohen
explique que l’imposant édifice construit en 1910 est à New York l’un des seuls bâtiments Art nouveau, du courant de la Sécession viennoise. Les motifs décoratifs sont sobres, abstraits ou représentent des figures humaines sans caractère sacré.
« Et l’auditorium est conçu de telle façon que l’orateur est au même niveau que l’assistance », souligne-t-elle.
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