New York, Adèle Smith

20/05/2009

{{Un mandat d’arrêt vise une mère opposée pour des raisons religieuses à la chimiothérapie de son fils de 13 ans.}}

La dernière fois qu’elle s’est exprimée en public avant de disparaître mardi avec son fils Daniel, Colleen Hauser ne comprenait pas pourquoi on ne laissait pas sa famille en paix. «On est une famille simple et honnête. On ne veut faire de mal à personne», disait-elle dans sa cuisine, le regard aimant tourné vers son fils, privé de sa tignasse blonde après une seule et unique séance de chimiothérapie, en janvier dernier. Le cancer de Hodgkin venait juste d’être diagnostiqué chez l’adolescent. Les médecins prédisaient 90 % de chances de guérison après une séance mensuelle pendant six mois, suivis de radiothérapie. Mais voilà, la famille Hauser, catholique, fait aussi partie d’un obscur groupe religieux, Nemenhah, inspiré des pratiques des Indiens d’Amérique. Chez ses adeptes, on ne croit qu’à la médecine naturelle, à base de vitamines et de plantes. Aussi, après avoir accepté une séance de chimiothérapie sous la pression des médecins, Colleen Hauser a décidé d’interrompre le traitement de son fils, qui selon elle «viderait son corps de son âme». Après la première radiographie, la tumeur avait pourtant diminué.

{{Un régime à base de riz, légumes verts et vitamines}}

La semaine dernière, la justice, saisie par les services médicaux et sociaux du comté dans le Minnesota, avait conclu que le cas de Daniel Hauser était une question de vie ou de mort, le taux de guérison sans traitement chimiothérapique étant établi à 5 %. Elle avait donc imposé à ses parents de le faire soigner par un spécialiste du cancer. Mais ni la mère ni le fils n’ont obtempéré. Dans cette famille nombreuse vivant dans une ferme d’un petit village nommé Sleepy Eye (œil endormi ), on croyait à la guérison totale du malade grâce à un régime à base de riz, de légumes verts, de plantes et de vitamines. Daniel, appelé lui-même à témoigner, avait prévenu qu’il se battrait et «donnerait des coups» à tout personnel médical qui tenterait de le soigner de force. Au tribunal, les parents ont affirmé que leur fils était capable de décider lui-même de la meilleure manière de se soigner, car il a rang de «médecin» et d’«ancien» au sein de Nemenhah. Mais les services sociaux ont rappelé que l’adolescent ne sait pas lire et a un retard de développement.

Les médias se sont emparés de cette histoire et des questions éthiques posées par ce drame familial. La justice avait ordonné un nouvel examen médical pour lundi dernier, ainsi qu’une nouvelle audience mardi. La radiographie a montré que la tumeur située près de la clavicule du garçon a «considérablement grossi». Daniel Hauser s’est aussi plaint de douleurs extrêmes, d’après la déposition du médecin qui l’a ausculté. Mardi, seul le père était pourtant présent au tribunal, Colleen et Daniel ayant fui le domicile familial «pour quelque temps». Anthony Hauser, apparemment dépassé par les événements, a promis de coopérer avec la justice et lancé un appel à la télévision pour le retour de sa femme et de son fils.

La mère, accusée désormais de négligence et de mauvais traitements, risque la prison. Daniel Hauser peut être temporairement enlevé à sa famille pour être soigné. Conscient du drame que vivent les Hauser, le juge en charge du dossier a promis la clémence si Colleen Hauser ramène son fils rapidement.

Le Figaro