Les faits

Le gouvernement a confirmé, le 1er octobre, que la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) sera placée sous la tutelle du seul ministère de l’intérieur dès janvier 2020. Une décision qui n’a pas manqué de faire réagir les associations d’aide aux victimes.

« Cette décision est grave et inquiétante », dénonce la Fédération française de l’ordre maçonnique mixte international « Le Droit humain ». Elle « crée une profonde émotion et laisse un malaise », rapporte l’Aide aux victimes de dérives dans les mouvements religieux en Europe et à leurs familles (Avref). Les réactions sont vives après qu’a été révélée, mardi 1er octobre, une restructuration de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, mieux connue sous son acronyme, « Miviludes ».

La mission de lutte contre les sectes bientôt sous tutelle de l’intérieur

La mission, qui n’avait pas vingt ans, était la cible de bien des rumeurs ces derniers mois. Celles-ci ont été entérinées par le ministère de l’intérieur et Matignon la semaine dernière. La Miviludes sera bel et bien dissoute au sein du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation, le CIPDR, organe de la Place Beauvau, dès janvier 2020.

Si des « enjeux de meilleure efficacité » sont avancés, ce sont des questions budgétaires qui, semblent-ils, justifient la disparition de la Mission interministérielle de lutte contre les dérives sectaires. En témoigne un référé de la Cour des comptes remis au premier ministre en mai 2017, qui préconisait déjà un rattachement de Miviludes au ministère de l’intérieur.

Une dissolution attendue

« Cette dissolution s’inscrit pleinement dans la ligne adoptée par les gouvernements successifs des dix dernières années », informe Étienne Ollion, chargé de recherche au CNRS. L’enseignant-chercheur, qui a écrit une Histoire de la lutte contre les sectes en France (1), rappelle notamment que Nicolas Sarkozy, alors président de la République, avait déjà tenté de « démanteler la mission, en 2008 ». La tentative avait avorté en raison des propos malvenus de la directrice de cabinet de l’Élysée, Emmanuelle Mignon, qui avait à l’époque indigné associations et élus.

« Aujourd’hui, les associations sont beaucoup moins puissantes qu’elles ne l’étaient », répond Étienne Ollion, interrogé sur la possibilité d’un recul du gouvernement d’Édouard Philippe sur le sujet. « Éteindre la Miviludes progressivement, en l’intégrant au Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation, c’est très stratège de la part du gouvernement. De ce point de vue, strictement politique, la décision du premier ministre fait sens. »

Dérive sectaire et radicalisation : « deux combats différents » ?

Malgré tout, les associations montent au front. « La lutte contre les sectes et [celle] contre la radicalisation sont deux combats différents », affirme le président de la Fédération française de l’ordre maçonnique mixte international « Le Droit humain ». « La dérive sectaire, ça peut toucher tout le monde. C’est très sournois. Une radicalisation, on la remarque plus vite et on voit plus vite d’où ça vient. »

(1) Raison d’État. Histoire de la lutte contre les sectes en France, La Découverte, 2017, 240 p.

source : lacroix.fr

  • Richard Flurin,
  • le 10/10/2019 à 08:49