Claude Alonso, 81 ans, est accusé d’ « abus de faiblesse» sur cinq femmes et de «viol» sur trois d’entre elles, dont sa propre fille. Son procès doit se tenir ce lundi 20 septembre.

Il s’était constitué un harem qui se voulait une reconstitution de l’Olympe en Gironde, à quelques kilomètres du bassin d’Arcachon, à Gujan-Mestras. Claude Alonso, 81 ans, est accusé d’« abus de faiblesse» sur cinq femmes et de «viol» sur trois d’entre elles, dont sa propre fille. Ces cinq femmes, à qui le gourou avait attribué des noms de déesses grecques, devaient se plier à des « exercices pratiques » afin de « sauver l’humanité et éviter l’Apocalypse », explique au Figaro Me Maleine Picotin-Gueye, l’avocate de la fille du pseudo-Zeus et spécialiste en dérives sectaires.

Ces femmes, il les a rebaptisées « Déméter », « Perséphone », « Hestia » ou encore « Artémis ». Le soir, il organisait chez lui, dans sa petite mezzanine, des soirées qui se terminaient bien souvent en bacchanales. Des orgies qui seraient le fruit, selon sa fille, d’une puissante emprise sectaire. Une enquête avait été ouverte en 2013 après que celle-ci a déposé plainte en 2012. Son procès, qui devait se tenir en 2020, devrait in fine avoir lieu ce lundi 20 septembre à la cour d’Assises de Bordeaux.

Nectar sacré et bacchanales

Fukushima ? C’est la faute d’ « Hestia», déesse protectrice de la famille et du couple : d’après «Zeus», elle ne s’était pas assez acharnée à la tâche ce jour-là. Alors « Hestia », se sentant coupable de la mort de tous ces malheureux, a redoublé d’efforts, se pliant à ses moindres désirs. « C’est comme ça qu’il obtenait leurs faveurs, en tenant des propos prémonitoires sur la fin du monde », explique Me Picotin-Gueye, qui dénonce un phénomène d’emprise au sein de cette communauté. L’une de ces femmes s’est suicidée, sans qu’un lien entre cet acte et l’ascendant de Claude Alonso n’ait été formellement établi. Une autre « devait s’habiller uniquement en jupe, afin d’assouvir le plus vite possible le gourou lorsque celui-ci estimait en avoir besoin », rapporte l’avocate.

Constituée essentiellement de femmes mais aussi d’hommes, la communauté de l’Olympe se retrouvait régulièrement au sein d’une propriété appartenant au gourou du groupe. Un lieu financé par les cours de danse donnés par sa fille, « Artémis », mais aussi par les autres adeptes, qui étaient redevables à « Zeus » d’une somme mensuelle de 700 euros, en échange de quoi ils obtenaient le gîte et le couvert. Et participaient à des soirées, qui commençaient toujours de la même manière : on apportait de grandes jarres remplies d’un étrange « nectar sacré » composé de vin rouge, d’anxiolytiques, de sperme et de menstruations des femmes de la communauté. La suite allait de soi.

Mécanisme d’emprise

Claude Alonso avait ses préférées. Mais celle qui était l’objet de toutes ses attentions, c’était surtout sa fille. Aujourd’hui âgée d’une quarantaine d’années, elle intègre la secte à l’âge de 19 ans. À l’époque, cela fait un moment qu’elle n’a plus revu son père. La dernière fois, c’était dans son lit de jeune fille. Il lui avait dit « que toutes les femmes passaient une nuit avec lui » et avait eu des gestes déplacés. Elle ne l’avait plus jamais revu, jusqu’à sa majorité. « Il lui a dit qu’il avait changé, qu’il avait des problèmes de santé. Elle s’est installée chez lui, et c’est là que le mécanisme d’emprise s’est mis en route », rapporte Me Picotin-Gueye.

Au départ, « Zeus » reste distant avec celle qui s’appelle désormais « Artémis ». Devenue déesse de la chasse, la jeune femme est chargée de recruter de nouveaux disciples lors de soirées. C’est à l’une de ces occasions qu’Artémis rencontre celle qui finira par s’appeler « Perséphone ». Elle lui fait intégrer la secte et noue avec elle une relation d’amitié. Puis les choses se corsent : après avoir vécu quatre ans au sein de l’Olympe, « Artémis » est violée une première fois par « Zeus ». Une situation qui va se répéter durant les six prochaines années. Jusqu’au jour où « Artémis » apprend que Perséphone est enceinte de « Zeus », et que ce dernier l’a poussée à avorter. « Ça a été le déclic pour ces deux femmes. Le mensonge de Claude Alonso a permis à ma cliente de prendre du recul », explique Me Picotin-Gueye, pour qui «il y a un lien évident entre les viols et l’emprise sectaire ».

Les deux amies portent plainte pour « viol » et « abus de faiblesse ». Une enquête, menée par l’Office Central pour la Répression des Violences aux Personnes (OCRVP), est ouverte. Mis en examen et incarcéré en 2015, Claude Alonso est finalement libéré sous contrôle judiciaire en 2017 pour des raisons de santé. 

« Personnalité mégalomaniaque »

« Viols, chantages, menaces, contraintes financières : tout indique qu’il y a une emprise sectaire », estime l’avocate de l’une des parties civiles, qui souligne que le mis en cause « fait état d’une personnalité mégalomaniaque ». « Il a toujours eu une attirance pour le bouddhisme et l’ésotérisme, se prétendant tantôt guérisseur, tantôt magnétiseur », ajoute-t-elle. Ancien directeur d’une agence immobilière à Libourne, Claude Alonso avait fait faillite après avoir exigé qu’on lui construise une pyramide de verre dans la cour du bâtiment de l’entreprise. Il y conviait ses employés, les invitant à le rejoindre dans son « bureau directorial ».

Selon Me Picotin-Gueye, une vingtaine de personnes auraient été victimes de son emprise. Hormis la fille de « Zeus » et son amie, aucune des autres adeptes n’a souhaité porter plainte, avançant qu’elles étaient consentantes. « C’est logique, puisqu’elles sont sous emprise », souffle l’avocate.

Mais le procès ce lundi 20 septembre pourrait être reporté : le mis en cause a programmé à cette date une opération au genou. Un rendez-vous « pas vital » selon l’avocate des parties civiles, « indispensable » selon son avocat, Me Georges Parastatis, qui a fait une demande de renvoi. Les parties civiles s’y sont opposées.

Contacté, l’avocat de Claude Alonso indique au Figaro que son client « nie les viols et l’emprise sectaire ». Me Parastatis met aussi en doute la qualification de « secte ». « Je me demande s’il ne s’agit pas d’un dossier intrafamilial qu’on a voulu appuyer en allant chercher ailleurs des éléments, notamment sur un plan sectaire qui n’existe pas », insiste le pénaliste pour qui, si le procès se tient lundi sans son client, «il sera impossible de faire lumière » sur les faits.

« Il voulait sauver l’humanité par les relations sexuelles » : le gourou de la secte de l’Olympe qui se prenait pour Zeus accusé de viol

Par Margaux d’Adhémar LE FIGARO 19.09.2021

Claude Alonso, 81 ans, est accusé d’ « abus de faiblesse» sur cinq femmes et de «viol» sur trois d’entre elles, dont sa propre fille. Son procès doit se tenir ce lundi 20 septembre.

Il s’était constitué un harem qui se voulait une reconstitution de l’Olympe en Gironde, à quelques kilomètres du bassin d’Arcachon, à Gujan-Mestras. Claude Alonso, 81 ans, est accusé d’« abus de faiblesse» sur cinq femmes et de «viol» sur trois d’entre elles, dont sa propre fille. Ces cinq femmes, à qui le gourou avait attribué des noms de déesses grecques, devaient se plier à des « exercices pratiques » afin de « sauver l’humanité et éviter l’Apocalypse », explique au Figaro Me Maleine Picotin-Gueye, l’avocate de la fille du pseudo-Zeus et spécialiste en dérives sectaires.

Ces femmes, il les a rebaptisées « Déméter », « Perséphone », « Hestia » ou encore « Artémis ». Le soir, il organisait chez lui, dans sa petite mezzanine, des soirées qui se terminaient bien souvent en bacchanales. Des orgies qui seraient le fruit, selon sa fille, d’une puissante emprise sectaire. Une enquête avait été ouverte en 2013 après que celle-ci a déposé plainte en 2012. Son procès, qui devait se tenir en 2020, devrait in fine avoir lieu ce lundi 20 septembre à la cour d’Assises de Bordeaux.

Nectar sacré et bacchanales

Fukushima ? C’est la faute d’ « Hestia», déesse protectrice de la famille et du couple : d’après «Zeus», elle ne s’était pas assez acharnée à la tâche ce jour-là. Alors « Hestia », se sentant coupable de la mort de tous ces malheureux, a redoublé d’efforts, se pliant à ses moindres désirs. « C’est comme ça qu’il obtenait leurs faveurs, en tenant des propos prémonitoires sur la fin du monde », explique Me Picotin-Gueye, qui dénonce un phénomène d’emprise au sein de cette communauté. L’une de ces femmes s’est suicidée, sans qu’un lien entre cet acte et l’ascendant de Claude Alonso n’ait été formellement établi. Une autre « devait s’habiller uniquement en jupe, afin d’assouvir le plus vite possible le gourou lorsque celui-ci estimait en avoir besoin », rapporte l’avocate.

Constituée essentiellement de femmes mais aussi d’hommes, la communauté de l’Olympe se retrouvait régulièrement au sein d’une propriété appartenant au gourou du groupe. Un lieu financé par les cours de danse donnés par sa fille, « Artémis », mais aussi par les autres adeptes, qui étaient redevables à « Zeus » d’une somme mensuelle de 700 euros, en échange de quoi ils obtenaient le gîte et le couvert. Et participaient à des soirées, qui commençaient toujours de la même manière : on apportait de grandes jarres remplies d’un étrange « nectar sacré » composé de vin rouge, d’anxiolytiques, de sperme et de menstruations des femmes de la communauté. La suite allait de soi.

Mécanisme d’emprise

Claude Alonso avait ses préférées. Mais celle qui était l’objet de toutes ses attentions, c’était surtout sa fille. Aujourd’hui âgée d’une quarantaine d’années, elle intègre la secte à l’âge de 19 ans. À l’époque, cela fait un moment qu’elle n’a plus revu son père. La dernière fois, c’était dans son lit de jeune fille. Il lui avait dit « que toutes les femmes passaient une nuit avec lui » et avait eu des gestes déplacés. Elle ne l’avait plus jamais revu, jusqu’à sa majorité. « Il lui a dit qu’il avait changé, qu’il avait des problèmes de santé. Elle s’est installée chez lui, et c’est là que le mécanisme d’emprise s’est mis en route », rapporte Me Picotin-Gueye.

Au départ, « Zeus » reste distant avec celle qui s’appelle désormais « Artémis ». Devenue déesse de la chasse, la jeune femme est chargée de recruter de nouveaux disciples lors de soirées. C’est à l’une de ces occasions qu’Artémis rencontre celle qui finira par s’appeler « Perséphone ». Elle lui fait intégrer la secte et noue avec elle une relation d’amitié. Puis les choses se corsent : après avoir vécu quatre ans au sein de l’Olympe, « Artémis » est violée une première fois par « Zeus ». Une situation qui va se répéter durant les six prochaines années. Jusqu’au jour où « Artémis » apprend que Perséphone est enceinte de « Zeus », et que ce dernier l’a poussée à avorter. « Ça a été le déclic pour ces deux femmes. Le mensonge de Claude Alonso a permis à ma cliente de prendre du recul », explique Me Picotin-Gueye, pour qui «il y a un lien évident entre les viols et l’emprise sectaire ».

Les deux amies portent plainte pour « viol » et « abus de faiblesse ». Une enquête, menée par l’Office Central pour la Répression des Violences aux Personnes (OCRVP), est ouverte. Mis en examen et incarcéré en 2015, Claude Alonso est finalement libéré sous contrôle judiciaire en 2017 pour des raisons de santé. 

« Personnalité mégalomaniaque »

« Viols, chantages, menaces, contraintes financières : tout indique qu’il y a une emprise sectaire », estime l’avocate de l’une des parties civiles, qui souligne que le mis en cause « fait état d’une personnalité mégalomaniaque ». « Il a toujours eu une attirance pour le bouddhisme et l’ésotérisme, se prétendant tantôt guérisseur, tantôt magnétiseur », ajoute-t-elle. Ancien directeur d’une agence immobilière à Libourne, Claude Alonso avait fait faillite après avoir exigé qu’on lui construise une pyramide de verre dans la cour du bâtiment de l’entreprise. Il y conviait ses employés, les invitant à le rejoindre dans son « bureau directorial ».

Selon Me Picotin-Gueye, une vingtaine de personnes auraient été victimes de son emprise. Hormis la fille de « Zeus » et son amie, aucune des autres adeptes n’a souhaité porter plainte, avançant qu’elles étaient consentantes. « C’est logique, puisqu’elles sont sous emprise », souffle l’avocate.

Mais le procès ce lundi 20 septembre pourrait être reporté : le mis en cause a programmé à cette date une opération au genou. Un rendez-vous « pas vital » selon l’avocate des parties civiles, « indispensable » selon son avocat, Me Georges Parastatis, qui a fait une demande de renvoi. Les parties civiles s’y sont opposées.

Contacté, l’avocat de Claude Alonso indique au Figaro que son client « nie les viols et l’emprise sectaire ». Me Parastatis met aussi en doute la qualification de « secte ». « Je me demande s’il ne s’agit pas d’un dossier intrafamilial qu’on a voulu appuyer en allant chercher ailleurs des éléments, notamment sur un plan sectaire qui n’existe pas », insiste le pénaliste pour qui, si le procès se tient lundi sans son client, «il sera impossible de faire lumière » sur les faits.

source : Par Margaux d’Adhémar LE FIGARO 19.09.2021