La Coordination contre les abus dans l’Église catholique en Italie (ItalyChurchToo) demande à la Conférence épiscopale le lancement d’une enquête indépendante. Selon cette association, les victimes pourraient atteindre près d’un million dans le pays.

«Nous demandons la pleine coopération de l’Église italienne à une enquête indépendante, menée par des professionnels crédibles». Telle est la demande adressée à la Conférence épiscopale italienne (CEI) par ItalyChurchToo. Le groupe, créé en février 2022, a fait parvenir une lettre en ce sens, le 10 mai, au président sortant de la Conférence épiscopale italienne, le cardinal Gualtiero Bassetti, ainsi qu’aux responsables du Vatican liés au dossier des abus sexuels.

Dans le cadre de la rencontre des évêques

La lettre a été rendue publique le jour de l’ouverture de l’assemblée générale de la Conférence épiscopale, le 23 mai, rapporte le site fattoquotidiano.it. Lors de la rencontre, qui dure jusqu’au 27 mai, une communication sur les activités et les propositions de lutte contre les abus -promues par le Service national pour la protection des mineurs- est prévue. La Conférence épiscopale italienne discute depuis des mois de la possibilité de créer une commission indépendante sur la pédophilie dans clergé, sur l’exemple de ce qui a été fait dans des pays comme l’Australie, les Pays-Bas ou encore la France.

Nécessité d’une commission indépendante

Dans sa lettre, ItalyChurchToo insiste sur l’indépendance d’une éventuelle commission. Francesco Zanardi, président de la Coordination, s’interroge sur une réelle volonté de l’Eglise dans le pays de connaître la véritable dimension des abus. «Une commission vraiment indépendante serait révolutionnaire, mais aussi très embarrassante. Parce que cela montrerait que l’Italie est le pays qui compte le plus grand nombre de prêtres pédophiles au monde».

Pour Francesco Zanardi, lui-même ancienne victime, cette estimation dérive d’une simple arithmétique. «En France, il y a 22’000 prêtres et la commission a identifié plus de 3’000 pédophiles et plus de 200’000 abus [selon les chiffres extrapolés par la commission Sauvé, ndlr.]. Puisque l’Italie compte 52’000 prêtres, il est raisonnable de penser que les pédophiles pourraient être trois fois plus nombreux, soit neuf ou dix mille. Et les abus se monter jusqu’à un million».

Pour une justice réparatrice

L’association de victimes exige donc une commission d’enquête composée d’experts qualifiés, à laquelle participeraient des représentants des victimes. Elle devrait être suivie par une commission parlementaire capable de préparer des instruments législatifs de prévention, par exemple l’obligation de dénoncer toute personne témoin d’abus, comme cela existe déjà en France, en Allemagne et en Suisse.

La Coordination aux évêques italiens pose ainsi sept demandes principales à la Conférence épiscopales, dont l’accès total aux archives, la mise en place de canaux de collaboration efficaces avec les institutions de l’État italien afin que les coupables soient poursuivis, l’établissement de centres neutres et compétents de repérages et d’écoute des victimes, ainsi que l’adoption de démarches de responsabilisation des délinquants envers les victimes, dans l’optique d’une justice réparatrice. Le Comité demande également aux évêques de promouvoir la suppression de la prescription pour les abus, comme cela se passe déjà dans d’autres pays.

Un livre sur les abus

La pression sur les évêques est encore augmentée par la sortie d’un livre, fin mai 2022, sur les abus sexuels dans le clergé italien. Signé par trois journalistes italiennes réputées, dont la vaticaniste Lucetta Scaraffia, l’ouvrage intitulé Agnus Dei. Les abus sexuels du clergé en Italie (Agnus Dei. Gli abusi sessuali del clero in Italia) tente pour la première fois de comprendre la situation italienne dans ce domaine, en la comparant notamment à celle d’autres pays. (cath.ch/fattoquotidiano/ilsismografo/arch/rz)

source : https://www.cath.ch/newsf/italie-un-million-de-victimes-dabus-dans-leglise/